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EN DEÇÀ ET AU DELÀ DU DANUBE

VI.[1]
LA ROUMÉLIE ORIENTALE — LA MACÉDOINE. — CONSTANTINOPLE.

De Sophia, pour atteindre les chemins de fer ottomans à Tatar-Bazardjik, j’ai une longue étape à faire : 130 kilomètres, et deux relèvemens de montagnes à franchir. On y met ordinairement deux jours en couchant à Ichtiman ; mais, au prix de 120 francs, j’obtiens une petite victoria attelée de quatre chevaux de front qui me conduira en un jour, en partant à la pointe du jour. j’ai pour compagnon un jeune avocat qui a fait ses études à l’université de Liège, M. Guérof ; il connaît parfaitement le pays et parle le turc aussi bien que sa langue natale, le bulgare. Il vient me prendre dès quatre heures du matin. Sur l’immense plaine déserte qui s’étend à perte de vue autour de Sophia traînent des brouillards argentés ; mais bientôt le soleil les pompe et les dissipe. Les deux rameaux des Balkans, qui enserrent cet ancien bassin lacustre, découpent leurs profils bleuâtres sur le ciel gris perle. Nous traversons sur un pont de bois l’Isker, qui venant de Samakof et du Rilo-Dagh, où il prend sa source, se divise ici en une foule de canaux qu’il creuse dans l’argile jaunâtre.

Le pays paraît dépeuplé. Nous ne rencontrons que quelques

  1. Voyez la Revue des 15 juin, 1er  août, 15 septembre, 15 octobre et 1er  novembre 1885.