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caractères de la race s’accusent avec évidence. Catherine est une Médicis. Devant son portrait, on ne peut se défendre de songer surtout à Léon X. La fille de Laurent II, qui avait quelque chose du caractère et de l’esprit de ses plus illustres ancêtres, tenait de son grand-oncle le goût du faste et de la magnificence. Elle lui ressemble en beau, le rappelle surtout par l’accentuation de la bouche, par les yeux un peu gros et à fleur de tête, par cette boursouflure malsaine que Raphaël a si noblement rendue dans le portrait fameux de la galerie Pitti. Le portrait crayonné de la reine mère n’a rien, d’ailleurs, que ne confirme le portrait écrit de Brantôme. Il était bon de les rapprocher l’un de l’autre.

Maintenant que nous connaissons les portraits d’Henri II et de Catherine de Médicis, faisons un détour encore avant d’arriver à Charles IX. Regardons les portraits de ses frères et de ses sœurs, pour aller ensuite à lui plus sûrement.

François II, mort à dix-sept ans en 1560, n’est guère dans ses portraits qu’un adolescent dont les traits ne sont pas encore définitivement arrêtés. C’est même le plus souvent à l’état d’enfant qu’il se trouve représenté. — Le charmant petit portrait de la collection van Ertborn, au musée d’Anvers, le montre vers l’âge de trois à quatre ans. On l’appelle encore Monseigneur le duc. Dans quelques mois, il sera dauphin de France. Il est représenté en buste, vêtu d’un justaucorps jaune à crevés blancs, que recouvre une petite jaquette dont les manches sont en velours rouge ; une chemisette de mousseline blanche, brodée de noir, complète le costume. Un médaillon, sur lequel est tracée la lettre M, est suspendu au cou par un fil de soie noire. La petite tête, vue de trois quarts à droite, est coiffée d’un bonnet de linge blanc, recouvert d’une toque noire, bordée de plumes de cygne et ornée de dix aiguillettes d’argent qui accompagnent une enseigne en émail représentant saint François agenouillé devant le Christ. Quelques mèches de cheveux blonds s’échappent de cette coiffure. Le visage est charmant, si charmant même qu’on soupçonne le peintre d’avoir été peut-être plus courtisan que vrai. Quel homme donnera un jour cet enfant ? On ne saurait dire, mais il est indéniable qu’on retrouve en lui quelque chose d’Henri II et qu’on n’y aperçoit rien de Catherine de Médicis. Au point de vue de l’art et surtout de l’art particulier qui nous occupe, ce portrait présente un sérieux intérêt, car on peut l’attribuer à François Clouet. On y retrouve, en effet, les qualités maîtresses qui ont été signalées dans les portraits de Charles IX, au Belvédère, à la galerie d’Ambras et au Louvre. C’est la même douceur et la même netteté d’impression, la même rigueur de dessin tempérée par les mêmes délicatesses de pinceau, la même peinture fluide et sans épaisseur sensible, le même modelé en pleine