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EN DEÇA ET AU DELA DU DANUBE

IV[1]
LES NATIONALITÉS CROATE ET SLOVÈNE. — LA SERBIE.

De Serajewo je comptais me rendre directement à Belgrade, par l’intérieur du pays ; mais je me décide à repasser par la Croatie, pour y étudier de plus près les revendications nationales hostiles à la suprématie magyare, qui viennent de donner lieu à une émeute et à des combats dans les rues d’Agram. Quand on voyage dans l’Autriche-Hongrie, cette question des nationalités vous suit partout. C’est la préoccupation constante et ardente de toutes les races diverses qui peuplent l’empire dualiste : Allemands, Hongrois, Tchèques, Polonais, Roumains et Croates. Les Français ne peuvent pas bien comprendre la puissance du sentiment ethnique ; ils ont dépassé ce a moment. » La France unifiée, surtout par la révolution, s’est transfigurée. Elle est devenue une divinité, la Patrie, pour laquelle ses enfans vivent et meurent s’il le faut. Le culte de la patrie est une religion ; c’en est encore une pour ceux qui n’en ont plus d’autre; elle s’est tellement emparée des âmes, qu’elle a presque effacé le sentiment de la race, même chez le Breton bretonnant, ce Celte qui ignore le français, chez le Provençal à moitié Italien, chez le Flamand du département du Nord, qui continue à parler le néerlandais, et chez l’Alsacien malgré sa

  1. Voyez la Revue du 15 juin, du 1er août et du 15 septembre.