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UNE
EXCURSION AUX ILES BALEARES

Les voyageurs de tempérament entreprennent de longues courses, vont explorer les pays lointains et font au besoin le tour du monde. Leur passion est plus forte que les obstacles qu’ils rencontrent et les dangers qui les menacent : ils obéissent à une vocation impérieuse. Le simple touriste, moins ambitieux, trouve à se satisfaire sans courir les aventures, en voyageant « aux rives prochaines. » Un peu de curiosité, l’esprit d’observation aidant, lui procure des plaisirs qui ne coûtent guère que la peine d’ouvrir les yeux et les oreilles. Tout est nouveau à qui se déplace pour se distraire, et tout devient intéressant si le déplacement a pour but l’instruction. L’étude hors de chez soi est pleine de charme, et rien n’est plus salutaire que ce travail sans fatigue, qui repose l’esprit et le détend. On se contenterait de l’imprévu, et l’on rencontre mieux encore. L’inconnu est à nos portes, tout près de nous, au-delà de la frontière, où l’on arrive en quelques heures. Voulez-vous en faire l’expérience, prenez un ou deux mois de vacances et allez parcourir les pays de langue catalane, en commençant par le continent. Pour visiter les îles voisines, n’attendez pas l’hiver, car la mer des Baléares n’est pas toujours clémente. La fin du printemps et le commencement de l’automne sont excellens pour naviguer dans ces parages. C’est alors que la nature est en fête dans cet archipel fortuné, où la saison rigoureuse est adoucie par la beauté du climat, et la chaleur intense tempérée par la brise marine. A moins de pousser jusqu’aux Canaries, les tempéramens délicats ne sauraient trouver dans le bassin de la Méditerranée une station plus propice à l’hivernage. George Sand, qui savait à quoi s’en tenir, n’hésitait pas à mettre l’île de Majorque bien au-dessus de la Suisse, et pour la salubrité et pour la beauté du paysage.