prodige dû à l’activité des officiers du génie. En France et en Belgique où l’on réclame une révision cadastrale afin de mieux répartir l’impôt foncier, on prétend que c’est une œuvre qui exigerait vingt ans de travail. L’arpentage s’est fait ici sous la direction supérieure de l’Institut géographique militaire et sur la base de la triangulation complète du pays. Des officiers et des ingénieurs ont levé le plan parcellaire des propriétés dans chaque commune, et l’estimation de la valeur cadastrale s’est faite par des taxateurs spéciaux qu’a contrôlés une commission centrale.
Tant que la Bosnie a appartenu à la Turquie, elle est restée terra incognita bien plus complètement que les hauteurs de l’Himalaya ou même du Pamir. Maintenant elle est connue dans tous ses détails : orographie, géologie, constitution et répartition de la propriété, régime agraire, population, races, cultes, occupations. Qui aura parcouru une publication officielle intitulée : Ortschaptsund-Bevolkerungs-Statislik von Bosnien und der Herzegowina, connaîtra ce pays-ci mieux que le sien. J’en extrais quelques chiffres très curieux. En 1879, les 1,158,453 habitans vivaient dans 43 villes, 31 marktflecken (localités où se tiennent des marchés), 5,054 villages et 190,062 maisons. On voit que la population rurale est dispersée dans un nombre considérable de hameaux, n’ayant en moyenne que 231 habitans. Six personnes par maison est un chiffre élevé, qui s’explique par le nombre assez grand des familles patriarcales. Le sexe masculin est remarquablement plus nombreux que le sexe féminin : 615,312 d’une part, et seulement 543,121 de l’autre, proportion peu favorable à la polygamie, qui, comme je l’ai dit, n’existe que chez les fonctionnaires turcs et nullement chez les musulmans indigènes. A Saint-Pétersbourg, au contraire, il y a 121 femmes pour 100 hommes. Voici un aperçu des professions : 95,490 capitalistes et propriétaires fonciers, dont un certain nombre cultivent eux-mêmes ; 84,942 cultivateurs-fermiers ; 54,775 manœuvres et ouvriers de toute espèce ; 10,929 marchands, boutiquiers, industriels ; 1,082 ecclésiastiques ; 678 employés ; 257 instituteurs et professeurs, et 94 médecins. Ce qui peint au vif la situation du pays, c’est l’effectif si étonnamment réduit de l’état-major des fonctions libérales. Malgré de récens progrès, combien il se fait peu pour les besoins intellectuels et moraux 1 Un seul maître enseignant pour 4,506 personnes. Évidemment pas un médecin dans les villages et même dans les bourgs. Le musulman se résigne, le. raya est pauvre, et tous demandent des remèdes aux exorcismes, aux plantes et à des recettes de sorcières. D’ordinaire, dans les pays primitifs il y a beaucoup de prêtres ; ici il n’y en a qu’un par 1,000 âmes, ce qui n’est guère. Les fonctionnaires ont beaucoup augmenté, et c’était une nécessité. Ils représentent la civilisation,