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en enseigne ; et cependant nous n’en parlons pas avec moins d’assurance et de sécurité de Fénelon et de Bourdaloue, de Bossuet et de Pascal. Il conviendrait d’en savoir davantage, et nous en comprendrions mieux le livre des Pensées. Si Bayle, il y a cent cinquante ans, ne nous avait pas appris que la règle des partis est déjà dans Arnobe, — et sous quelque forme qu’elle y soit, le rapprochement ou la constation a sans doute son importance, — le saurions-nous aujourd’hui ? Comment n’en pas douter au moins, lorsque je vois, faute d’avoir mieux connu les sources où Bossuet et Pascal ont puisé, tout ce que l’on a dit sur cette question de savoir si Bossuet avait imité les Pensées, ou Pascal entendu les Sermons de Bossuet. Bossuet n’aurait-il pas eu communication des papiers de Pascal ? ont demandé les uns. Ne serait-ce pas plutôt Pascal qui aurait pris des notes aux sermons de Bossuet ? ont répondu les autres. Mais ils se sont formés tous les deux à l’école de saint Augustin, et, par de la saint Augustin, dans la lecture et la méditation de l’Évangile et de l’Ancien-Testament. Quand on part du même point et que l’on passe par les mêmes chemins, est-il étonnant que l’on arrive tous les deux au même but ? C’est faute encore d’avoir mieux étudié son sujet que, dans cette recherche des « sources » des Pensées, un récent éditeur a reconnu « quelques-uns des traits essentiels des doctrines théologiques de Pascal » dans le Pugio fidei d’un moine du moyen âge ; « l’application des prophéties des livres saints à Jésus-Christ, » par exemple, ou encore « la théorie du péché originel ! » Quoi donc ? Si Raimond Martin, l’auteur du Pugio fidei, n’eût pas découvert, sans doute, « la théorie du péché originel, » le savant éditeur veut-il dire que Pascal n’en eût pas ouï parler ? ou que le christianisme ne se fût pas avisé de l’application des « prophéties des livres saints à Jésus-Christ, » sans le secours du même Raimond Martin ? Il pourra dire, je le sais bien, que, si c’était son opinion, c’est aussi celle de quelques pasteurs protestans qui lui ont uniquement reproché là-dessus de n’avoir pas examiné d’assez près ce livre et ce dominicain. Mais peut-être pensera-t-on plus généralement que, si c’est là ce qui se peut trouver de plus neuf à dire sur Pascal, on ferait aussi bien de s’en taire.


Tels sont, sauf erreur ou méprise, les principaux points de la vie et des œuvres de Pascal sur lesquels nous voudrions avoir de plus amples eclaircisseinens.il y en a d’autres, après cela, qui ne laissent pas d’avoir leur intérêt. Où donc lisais — je, tout récemment encore, une Étude sur la syntaxe de Pascal ? Je crains bien que ce ne fût pas dans une publicatiou française, mais dans quelque revue allemande[1]. Elle

  1. Zeitschrift fur französische Sprache und Litleratur, t. IV, (1882), p. 95. Bemerkungen uber die Syntax Pascals, par A. Haase.