Page:Revue des Deux Mondes - 1885 - tome 70.djvu/564

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à son armée, dont le chiffre s’élevait à près de 50,000 soldats; 13,500 hommes du corps d’York, 10,000 hommes du corps de Kleist, 13,700 du corps de Sacken, et environ 11,000 hommes, détachés du corps de Langeron, sous les ordres des généraux Kapzewitch, Rudzewitch et Korff. A la vérité, Blücher s’attendait d’avoir à combattre sous les murs de Paris des forces assez considérables ; mais, avant qu’il fût arrivé là, il comptait être rejoint par Winzingerode et Bulow, qui étaient le 24 février, le premier à Reims et le second à Laon, et dont il se rapprochait en remontant vers la Marne. D’autres renforts encore étaient en route. Le général comte de Langeron, qui avait quitté Mayence le 2 février, sur les ordres pressans de Blücher, était le 24 à Vitry-le-François, et son lieutenant, comme lui émigré au service de la Russie, le général comte de Saint-Priest, entrait alors en Lorraine. Blücher pensa que si une partie seulement de ces troupes le rejoignait à temps, les autres serviraient à protéger ses derrières contre un retour éventuel de Napoléon. D’ailleurs, pour le moment, le feld-maréchal croyait n’avoir rien à redouter de l’empereur. Il le savait entraîné à la poursuite de l’armée de Bohême et estimait que les 100,000 hommes du prince de Schwarzenberg suffiraient à l’occuper quelques jours.

Ainsi, le 24 février, Blücher se mit en marche, ayant pour objectif tactique Marmont, et pour objectif stratégique Paris. Le 25, les têtes de colonnes de l’armée de Silésie attaquèrent le petit corps de Marmont, sur les hauteurs de Vindé, en arrière de Sézanne. Les Français se retirèrent à pas comptés, couverts par des échelons d’artillerie qui arrêtèrent les charges incessantes de la cavalerie ennemie. Le 26, Marmont atteignit La Ferté-sous-Jouarre, toujours suivi par les Prussiens de Kleist et d’York, tandis que les Russes de Sacken et de Kapzewitch marchaient directement sur Meaux par la grande route de Coulommiers. A La Ferté-sous-Jouarre, Marmont fut rejoint par le maréchal Mortier, auquel il avait demandé de réunir ses forces aux siennes, selon les ordres du major-général. Les deux maréchaux se trouvaient désormais à la tête d’une dizaine de mille hommes. Ils résolurent de défendre à tout prix la rive droite de la Marne, de façon à couvrir Paris, et ils passèrent la rivière à Trilport dans la matinée du 27. Marmont dirigeait le passage des troupes, lorsqu’il entendit soudain une vive fusillade du côté de Meaux. Il y court en un temps de galop, rallie dans les rues deux ou trois cents hommes, canonniers de la marine et gardes nationaux, et, mettant l’épée à la main, charge les Russes, qui déjà s’étaient emparés du pont du Cornillon et de l’une des portes de la ville. L’ennemi recule et abandonne le pont, que les canonniers brûlent presque sous ses pas. Le gros des troupes françaises