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regagnés, au moins pour partie. Cette fois ; il n’en a pas été ainsi, non-seulement à cause de la note prédominante de lourdeur, mais parce que le matin même était arrivée de l’extrême Orient la dépêche de l’attentat de Hué. La spéculation, surprise par cet incident, dont il était impossible de calculer sur l’heure la portée et de prévoir les suites, a renoncé à toute velléité de lutter contre le courant d’inquiétude qui s’était aussitôt établi. Les cours ont fléchi, loin de remonter, et ce n’est qu’à un arrêt presque complet des affaires que le marché a dû de ne pas subir une réaction plus étendue. Le 3 pour 100 s’est arrêté, en effet, à 80.80 et le 4 1/2 à 110 francs.

Tandis que des télégrammes ultérieurs rassuraient l’opinion publique sur les suites de ce grave incident, son attention était ramenée sur la question afghane et sur l’orientation générale de la politique extérieure de l’Angleterre par les déclarations que le marquis de Salisbury venait de faire à la chambre des lords.

Bien qu’un peu ambiguës, ces déclarations ont reçu bon accueil sur le continent. Le nouveau cabinet s’engageait en fait à ratifier tous les sacrifices déjà consentis par M. Gladstone à la cause de la paix. C’était là le point essentiel pour la spéculation, et la question afghane a bientôt cessé de figurer au premier rang des motifs de préoccupation. Les Consolidés se sont élevés peu à peu jusqu’au cours rond de 100 francs. Les valeurs internationales ont été l’objet d’une reprise à peu près générale ; les fonds russes surtout se sont raffermis à Berlin.

La quinzaine finit donc mieux que ne le permettaient d’espérer les mauvaises nouvelles arrivées lundi. Les rentes ont un peu repris sur les plus bas cours : le 3 pour 100 à 81.10, le 4 1/2 à 110.30. Les affaires sont tellement réduites que l’on ne prévoit pas pour le reste du mois de grandes variations dans un sens ou dans l’autre. Il ne pourrait se dessiner un peu de hausse que si l’épargne sortait du recueillement où on la voit se confiner depuis le début du mois.

Bien que la chambre poursuive hâtivement, avant de se séparer, la discussion du budget, ces débats n’excitent que peu d’intérêt. Chacun sait que le budget ne peut être étudié sérieusement cette année, et que la prochaine chambre pourra seule aborder l’étude fort ardue des moyens propres à prévenir le développement du déficit et à effectuer la liquidation des gaspillages et des excès des dernières années. Des économies et un emprunt, tel sera le mot d’ordre dans quelques mois ; pour l’instant, il faut laisser les choses suivre leur cours, si peu satisfaisant qu’il soit. La moins-value des impôts pour juin est de 5 millions et demi ; elle atteint 20 millions pour la totalité du premier semestre. Il est vrai que cette moins-value n’existe que comparativement aux évaluations budgétaires. La diminution ne dépasse pas 1 million sur les recouvremens effectués dans la période correspondante de 1884.