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accusé d’avoir compromis une fois de plus l’Italie par sa politique, et le président du conseil, M. Depretis, a été obligé plus d’une fois de venir à son secours pour le défendre de votes hostiles que la brillante parole de M. Mancini n’eût pas seule réussi à détourner. On en était là lorsque le budget des affaires étrangères, soumis il y a quelques jours au parlement, a failli être rejeté ; il n’a été voté qu’à trois ou quatre voix de majorité. M. Mancini a témoigné aussitôt l’intention de se retirer, et M. Depretis, acceptant le principe de la solidarité ministérielle, a remis au roi la démission du cabinet tout entier. Un fait à considérer, c’est que tout cela s’est passé sans une bien vive animation dans le parlement, surtout sans provoquer la plus légère émotion dans le pays. Le roi Humbert a fait, dans cette circonstance, ce qu’il fait d’habitude, en vrai souverain constitutionnel. Il a appelé auprès de lui le président de la chambre, le président du sénat, les chefs des divers partis, le général Cialdini, qu’il consulte toujours, et le résultat, du reste prévu, de toutes ces consultations a été que M. Depretis seul pouvait être chargé de reconstituer un ministère. C’est, en effet, la fortune du vieux Piémontais d’avoir acquis par son bon sens pratique, par son expérience, par son habileté de tacticien, une sorte de prépotence parlementaire, d’être devenu l’arbitre de la politique au-delà des Alpes. Sorti de la gauche, il a la modération de l’âge et de la prévoyance, la raison solide du Piémontais de vieille souche, et la confiance qu’il inspire tient à ce qu’on est sûr qu’il ne s’engagera ni dans des aventures démocratiques, où la monarchie constitutionnelle risquerait de sombrer, ni dans des aventures extérieures où l’Italie pourrait être compromise sans compensation.

CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LÀ QUINZAINE.

Au début du mois de juin était annoncée, à grand renfort de réclames bruyantes, une campagne de hausse sur le 3 pour 100 et le Suez. On prétendait arriver avant peu à 85 ou 86 francs sur l’un, à 2,500 francs sur l’autre. Le mois de juillet, avec son contingent de capitaux, donnerait au mouvement l’impulsion décisive. En juin, on se contenterait