comptoirs allemands existaient ou étaient en voie d’établissement. En même temps, MM. Hansemann et Bleichröder étaient avisés qu’il serait déféré à leur demande partout où ils pourraient démontrer que leurs prétentions ne seraient pas en contradiction avec les droits acquis d’autres nations.
L’astucieux chancelier était résolu à ne point agir tant que l’Angleterre ne lui en aurait pas inconsciemment donné le signal par la proclamation de son protectorat. En attendant, il détourna l’attention des ministres anglais par une correspondance relative à l’établissement d’une commission mixte chargée de débattre et de régler les intérêts des deux pays dans la mer du Sud. Ne se doutant point des intentions du chancelier et désireux de se le concilier, le cabinet anglais le fit informer, le 19 septembre, par son chargé d’affaires à Berlin, M. Scott, des ordres donnés pour la proclamation du protectorat britannique sur la Nouvelle-Guinée, et de l’étendue de ce protectorat qui comprendrait toutes les côtes de l’île, non revendiquées par la Hollande, à l’exception de la portion de la côte nord située entre le 141e et le 145e degré de longitude, et embrasserait aussi toutes les petites îles adjacentes. L’extension jusqu’au 145e degré avait pour objet d’englober les naturels de race malaise qui avaient exprimé le désir d’être placés sous la protection anglaise. Sur les représentations du baron von Plessen, qui avait fait connaître la surprise causée à son gouvernement par la communication de M. Scott, celui-ci fut chargé par lord Granville, le 9 octobre, d’informer le cabinet de Berlin que l’Angleterre avait résolu de restreindre le protectorat à la côte sud et aux îles adjacentes au lieu de lui donner l’étendue d’abord projetée, mais toujours sans préjuger les questions territoriales au-delà de ces limites. M. Scott exprimait en même temps la satisfaction de son gouvernement de se trouver en complet et amical accord avec le gouvernement allemand sur cette question de la Nouvelle-Guinée. Le 18 novembre, le consul allemand à Sydney avisait le chancelier de la proclamation du protectorat anglais par le commodore Erskine, et dès le 18 décembre le drapeau allemand était arboré sur la côte nord de la Nouvelle-Guinée, sur les îles de la Nouvelle-Bretagne, de la Nouvelle-Irlande et les îles adjacentes. Le comte Munster était chargé d’annoncer le fait à lord Granville et de lui dire, ce qui était une amère ironie, que cette double annexion de la part de l’Angleterre et de l’Allemagne, ne préjugeait point les délibérations de la commission mixte de la mer du Sud.
L’annexion si inopinément accomplie par l’Allemagne produisit en Angleterre la plus vive et la plus pénible émotion, et prévoyant la tempête qu’elle soulèverait en Australie, le cabinet anglais voulut arriver, à tout prix, à un arrangement avec le chancelier. Tel fut