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servir de lien et de centre de réunion à tous ceux qui, en Angleterre ou aux colonies, se prononcent en faveur de cette transformation de l’empire britannique. En revanche, d’anciens ministres des colonies, et particulièrement lord Norton, combattent avec une extrême vivacité ce qu’ils déclarent être un projet chimérique et irréalisable. Malgré le nombre des écrits qu’ils ont publiés, les partisans de la confédération ne sont point encore arrivés à donner à leur projet une forme pratique. La combinaison qui soulève le moins d’objections consisterait à conférer une sorte de mandat politique aux agens généraux que chacune des colonies entretient aujourd’hui auprès du gouvernement métropolitain. Ces agens généraux ont été créés primitivement pour surveiller en Angleterre l’émission et le service des emprunts que les colonies étaient autorisées à contracter : depuis l’établissement du régime parlementaire aux colonies, ils servent d’intermédiaires pour les communications qui s’échangent entre les ministres coloniaux et le ministère anglais, le secrétaire d’état, pour les colonies, n’ayant de rapports officiels qu’avec les gouverneurs nommés par la reine. Ces agens généraux, qui remplissent en quelque sorte auprès du gouvernement métropolitain le rôle d’ambassadeurs de la colonie qui les a accrédités, seraient réunis en une sorte de comité consultatif : le gouvernement qui les fait appeler individuellement pour leur demander des renseignemens et des indications pourrait les inviter à émettre, sur certaines questions graves, un avis collectif ; mais comme cet avis, fût-il unanime, ne pourrait enchaîner, en aucune façon, la liberté d’action du gouvernement, et encore moins celle du parlement, il est aisé de voir que cette combinaison esquive les difficultés du problème et ne le résout pas. Reconnaître à un degré quelconque le droit des colonies à être consultées sur la politique de l’empire, c’est soulever du même coup la question de leur représentation au sein du parlement. La France, assimilant ses colonies à ses départemens continentaux, leur a accordé un certain nombre de sièges dans ses assemblées législatives ; l’Espagne en a fait autant pour Cuba ; mais, dans l’un de ces pays comme dans l’autre, le nombre des députés coloniaux est trop faible pour qu’ils puissent exercer une action sensible sur la politique métropolitaine. Il n’en serait pas de même chez nos voisins, à cause du grand nombre de leurs colonies et de la population considérable de plusieurs d’entre elles. Les Anglais pourraient-ils admettre que, tandis qu’eux-mêmes n’auraient aucune action sur les affaires intérieures de la Nouvelle-Galles du Sud ou du Canada, la solution de quelques-unes des questions qui les intéressent, telles que l’administration des comtés, l’organisation judiciaire, la législation sur les faillites ou la marine marchande,