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deux des plus redoutables chefs de bande du Bassigny, Jean et Louis de Chauffourt, ne recevant aucune réponse à des réclamations du même genre qu’ils avaient adressées au cardinal, envoyèrent à René d’Anjou, son petit-neveu et son successeur, des lettres de défi pour le prévenir qu’ils lui feraient désormais tout le mal possible.

Pendant les deux premières années de la régence du duc Charles II, quatre aventuriers ne cessèrent d’infester la partie méridionale du Barrois et de la châtellenie de Vaucouleurs : c’étaient les frères Amé, Jean, Bernard et Louis du Fay, fils de Henri du Fay et de Julienne de Poitiers, qui occupaient la forteresse de Bazoilles située un peu au sud de Neufchâteau. Sous prétexte que le duc de Lorraine avait jadis ordonné la démolition de cette forteresse, ils s’acharnèrent à lui faire la guerre et à lui porter dommage par tous les moyens dont ils pourraient disposer jusque vers le milieu de 1423. De leur côté, les partisans du dauphin, notamment Robert de Saarbruck, seigneur de Commercy, et Robert de Baudricourt, capitaine de Vaucouleurs, ne restaient pas inactifs ; ils faisaient à travers le bailliage de Chaumont des chevauchées continuelles, d’où ils ne manquaient jamais de rapporter du butin mort ou vivant, des marchandises, de l’argent, du bétail ou de riches particuliers ; ils exigeaient de grosses rançons de tous les serviteurs et aussi parfois des simples sujets du duc de Bourgogne ou de Henri V qui tombaient entre leurs mains. Au mois de décembre 1421, Jean Peguillot, de Langres, fait prisonnier par Robert de Baudricourt, emprunta deux cents écus d’or à maître Gui Gelenier, conseiller ducal à Gray, pour payer sa rançon. Chacune de ces prises, chacune de ces courses appelait une revanche que les capitaines anglo-bourguignons du voisinage n’avaient garde de ne pas prendre, et c’étaient toujours, cela va sans dire, des villages situés comme Domremy dans le ressort de la châtellenie de Vaucouleurs, qui faisaient les frais de ces représailles.

Au commencement de 1422, les déprédations des garnisons anglaises ou anglo-bourguignonnes du Bassigny étaient devenues si onéreuses aux populations du Barrois et des quelques villages de la Champagne restés fidèles au dauphin que Charles II s’en plaignit à son voisin le duc de Bourgogne. Aussitôt qu’il fut saisi de ces réclamations, Henri V se montra tout disposé à y faire droit, moyennant toutefois que le duc de Lorraine lui prêterait serment de foi et hommage pour les terres relevant du royaume et jurerait d’observer le traité de Troyes. Le beau-père du duc de Bar, qui craignait les Anglais plus qu’il ne les aimait, avait réussi jusqu’à ce jour à éluder sous divers prétextes l’accomplissement de ces formalités ; il dut cette fois se résigner à les subir ; le traitement infligé à René d’Anjou que le régent de France venait de dépouiller de son comté de