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et apparent, c’est que le cabinet de Londres, revenu d’une première émotion, a dû voir qu’il était allé un peu vite au lendemain du combat de Penjdeh, qu’il s’était trop hâté de prendre feu, de confondre la question de la frontière de l’Afghanistan, qui est toujours la principale, et la question de l’incident militaire survenu si malencontreusement. Il s’est aperçu qu’il faisait fausse route en mettant assez brutalement en cause la bonne foi du cabinet de Saint-Pétersbourg dans l’interprétation des engagemens du 17 mars et en demandant presque impérieusement au gouvernement russe ce que celui-ci ne pouvait pas lui accorder, une enquête sur la conduite de ses généraux devant Penjdeh. La question était évidemment mal engagée, c’est ce qui avait tout aggravé. Le gouvernement anglais l’a vu et, plutôt que de s’engager par emportement, par obstination dans une guerre redoutable, il n’a point hésité à s’arrêter, à revenir à demi sur ses pas. Il est même allé un peu vite dans son retour, il s’est abstenu d’insister sur ce qui avait éveillé les susceptibilités russes, et, dès que l’affaire d’honneur était écartée, tout devenait facile. On s’est mis aussitôt à négocier sur cette éternelle délimitation, qui est même déjà réglée, — à peu près à la satisfaction de la Russie, — et on s’est entendu pour charger un arbitre, qui n’est pas encore désigné, qui ne le sera peut-être jamais, de prononcer non sur la question de la conduite des généraux du tsar, mais sur l’interprétation des engagemens du 17 mars. La paix, sans être absolument assurée, est donc redevenue à peu près vraisemblable, et, au fond, l’Angleterre est satisfaite de n’avoir pas à subir une telle guerre; mais si la question extérieure est presque résolue, M. Gladstone va sûrement avoir à répondre, dans son parlement, à de redoutables attaques, et pour ses précipitations du premier moment, et pour les concessions qu’il fait aujourd’hui, au risque de compromettre la situation de l’Angleterre en Asie.

CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

L’acceptation par la Russie de la proposition d’arbitrage a sauvé les marchés financiers d’un véritable désastre. Pendant toute la dernière