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diverses modifications proposées dans les publications qui en sont issues, relativement à la méthode et à la manière de traiter certains problèmes, méritent ou non d’être acceptées.


I.

Le public, le grand public, qui ne fait pas loi dans les questions d’école, mais qui se forme certaines idées d’ensemble avec lesquelles il est bon de compter, sauf à les contrôler s’il y a lieu, regarde comme acquise la définition qui fait de l’économie politique la science de la richesse. Tout ce qui a le caractère de valeur produite, échangeable, forme son domaine théorique, de même que son but pratique est la multiplication des biens utiles répartis entre les individus selon des règles que la science regarde comme n’étant pas purement arbitraires. Or cette conception générale nous a paru, dans plusieurs des traités émanés des écoles de droit, interprétée d’une façon qui tend à s’éloigner des définitions reçues, sans que les amendemens et les commentaires qu’on y apporte soient toujours suffisamment justifiés. Le sujet est, je le reconnais, moins facile qu’on ne pourrait le croire au premier abord, et ceux qu’on nomme les maîtres n’ont pas toujours montré entre eux un parfait accord : on a pu relever chez quelques-uns des obscurités et des contradictions. Toujours est-il que, si on innove, ce doit être pour faire mieux. Est-ce bien ce que permettent de constater les om rages qui portent d’ailleurs à divers égards la marque d’un grand savoir et d’un mérite réel, et qui serviront de matière à cet examen?

Je dirai d’abord un mot de M. Paul Cauwès, appelé il y a quelques années à prendre la succession de M. Batbie dans la chaire d’économie politique à la faculté de droit de Paris. M. Cauwès a publié sous le nom de Précis la substance des leçons qu’il y a faites avant que lui-même cédât la place à un autre professeur. Le titre de Précis n’est peut-être pas le mieux approprié à deux énormes volumes où les développemens abondent. Une telle accumulation de faits, de chiffres, de documens, des questions d’application traitées avec le plus grand luxe de détails, celle des sucres par exemple et d’autres du même genre, ne sont sans doute pas ce qu’on attendrait d’un ouvrage général et d’un cours fait à l’école de droit. Mais enfin les questions de fond sont traitées aussi, et elles le sont de telle sorte qu’il est visible que le dessein de réformer l’économie politique est la préoccupation à peu près constante de l’auteur. Cet esprit réformateur se porte d’abord sur la nomenclature. M. Cauwès fait de la richesse une science spéciale qu’il nomme chrématistique, simple province de la science économique, laquelle aurait le travail pour