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d’autres institutions qui ont un vrai service public pour objet, comme, par exemple, les compagnies de chemins de fer : le service des transports est-il d’un ordre supérieur à la constitution des assurances sur la vie? La création des caisses d’épargne postale due à l’initiative de M. Arthur Legrand, député de la Manche, a été un grand pas fait en avant.

A côté des excès à craindre et qu’il faut surveiller toujours, il est bon de noter les combinaisons nouvelles prises pour aider au développement des assurances et dont la plus importante a été l’admission au partage des bénéfices des assurés avec leurs assureurs mêmes. Aucune réponse meilleure ne pouvait être faite aux détracteurs des sociétés anciennes si prospères, si utiles à tous, et l’augmentation très légère qui, dans le paiement de la prime, a admis l’assuré au partage des profits réalisés par les sociétés a enlevé toute méfiance à l’égard de ces profits. Plus que toute propagande, plus que tout programme laudatif, ce système est devenu le moyen le plus efficace de progrès, soit que ce partage des bénéfices s’effectue par un paiement en argent, par une augmentation de la somme assurée, ou par une diminution de la prime à payer.

Il reste une remarque importante à présenter. Les assurances sur la vie diffèrent des autres assurances en ce sens qu’il y a toujours un paiement à effectuer par les assureurs. Un incendie peut ne jamais se produire, un accident même peut ne pas arriver. La mort arrive toujours, et la somme stipulée avec délai sera soldée aux uns ou aux autres. C’est donc pour les administrateurs des compagnies un devoir rigoureux d’être continuellement sur la brèche, de tenir toujours disponibles les sommes qui sont nécessaires à ces paiemens, comme d’évaluer à leur juste prix les chances que peuvent leur faire courir leurs cliens; en un mot, il leur faut rectifier sans cesse leurs tables de mortalité.

De grandes variations existent à ce sujet, et la science des actuaires, c’est-à-dire des calculateurs chargés de ces appréciations, est toujours en éveil sur ce point. Faire des réserves annuelles, bien placer ses capitaux, bien équilibrer les primes, voilà le premier devoir des sociétés ; il en est un autre non moins impérieux, celui de savoir borner ses dépenses. Dans les chiffres cités pour 1883, nous avons montré à dessein qu’elles nous paraissaient bien considérables. Est-il nécessaire, comme on l’a fait en 1883, de dépenser 9 millions 1/2 afin d’en encaisser 114, et surtout devait-on distribuer en commissions une somme de 10 millions 1/2 pour les assurances sur la vie ? Nous avons déjà dit quelques mots de ce fléau des commissions, nous y reviendrons plus tard, car la commission s’applique à toutes les formes de l’assurance, et elle a nui aux assurances sur l’incendie aussi bien qu’aux assurances sur la