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des dispositions du public, porté à l’épargne personnelle, qu’à cause des modes de placement de ces épargnes mêmes. Contrairement, aux habitudes anglaises, nos compatriotes aimaient mieux s’en remettre à eux du soin de préparer l’avenir en ne confiant aucun capital à des sociétés d’assurances, mais en épargnant le plus possible du bénéfice de leur travail et en le plaçant sur des titres dont la plus-value toujours certaine pouvait être plus ou moins rapprochée. D’anciennes combinaisons, comme celles particulièrement connues sous le nom de tontines, qui avaient eu de nombreux partisans, qui, après une association de plusieurs années, composée de participans de n’importe quel âge, assuraient le partage des versemens effectués entre les seuls associés survivans, avaient été successivement abandonnées et rendaient les assurances sur la vie encore moins populaires. Toutefois les compagnies adoptèrent de nouvelles combinaisons qui modifièrent peu à peu nos habitudes : la plus importante fut celle qui admit les associés au partage des bénéfices réalisés par les sociétés elles-mêmes, et, à partir de ce moment, le mouvement de propagande s’étendit. Les calculs que nous empruntons au Moniteur des Assurances, le plus utile recueil publié sur ce sujet, qu’a fondé M. Eugène Reboul, dont le nom fait autorité en cette matière, et qu’a continué M. Alfred Thomereau, nous permettront d’apprécier les résultats obtenus[1].

On peut diviser en trois périodes les mouvemens qu’il s’agit de signaler : 1° de l’origine des assurances jusqu’en 1870; 2° de 1870 à 1880; 3° enfin l’état actuel. Mais une première réserve doit être faite. Les statistiques du Moniteur des Assurances ne peuvent comprendre toutes les opérations réalisées en France : il faut en écarter d’abord celles qui sont contractées avec des sociétés étrangères qui viennent chercher des cliens parmi nous et qui en obtiennent un plus ou moins grand nombre selon les facilités qu’elles offrent et la réputation dont elles jouissent. Or le nombre en est considérable. Il faut aussi écarter les sociétés françaises qui ne publient pas le chiffre de leurs opérations, celles qui ont leur siège en province et ne jouissent d’aucune notoriété. C’est sur une vingtaine de sociétés seulement que les derniers tableaux des opérations ont été établis par le Moniteur des Assurances[2]. Mais plusieurs sont

  1. Dès 1860, les plus remarquables travaux avaient été faits en faveur des assurance! sur la vie. M. Francisque Sarcey avait ouvert la marche en publiant sa brochure : Faut-il s’assurer. MM. Michel Chevalier, Clément Duvernoy, Edmond About, Alfred de Courcy, le plus actif propagateur des assurances, Eugène Reboul, A. Cochin, poursuivirent une campagne dont le succès ne fut plus démenti.
  2. Ces sociétés sont : la Compagnie d’assurances générales, l’Union, la Nationale, la Caisse paternelle, la Caisse générale des familles, l’Urbaine, le Monde, l’Alliance, le Soleil, l’Aigle, la Confiance, le Patrimoine, l’Abeille, la France, la Foncière, la Centrale, le Nord, la Métropole, le Progrès national, la Providence et l’Ouest.