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ressources à secourir les blessés, les malades, les veuves, les invalides et les familles ouvrières réduites à l’indigence. En outre, depuis 1873, une caisse de retraites, distincte de la première, est formée par une retenue de 1 pour 100 sur les salaires et par une subvention égale de l’exploitant, les fonds devant être employés en rentes sur l’état. M. Etienne Dupont calculait naguère que, pendant une période de cinq ans, cette compagnie houillère avait dépensé par année moyenne, pour secours divers accordés à un personnel de deux mille quarante-trois ouvriers, une somme de 242,427 francs. De même, à la Grand’Combe, à côté d’une association de secours mutuels alimentée par une retenue de 3 pour 100 sur les salaires et par une dotation de la compagnie[1], on a institué en 1870 une caisse de retraite, obligatoire pour les employés et facultative pour les ouvriers, dont l’actif est composé par une retenue de 1 pour 100 sur les appointemens ou les salaires, sans qu’un prélèvement supérieur à 24 francs puisse être exercé, et par un versement, qu’opère la compagnie, de 1 pour 100 sur les bénéfices de l’année. En outre, cette compagnie reçoit en dépôt les économies de ses employés et de ses ouvriers, jusqu’à une certaine somme, en servant 5 pour 100 d’intérêt[2].

Cette description, quoique incomplète, suffit à donner une idée des efforts tentés et des succès obtenus sous le régime de l’initiative individuelle et de la liberté. On connaît les traits principaux de l’organisation qu’il s’agit aujourd’hui de détruire et de remplacer.

Les Cahiers de doléances signalent cette transformation comme la première et la plus importante de toutes les réformes. Après avoir, dans des considérations générales, protesté contre l’intervention exagérée de l’état, « déplorable tradition qui date de l’autocratie de Louis XIV, » et fait l’éloge du self-help au nom du

  1. Cette institution assure : 1° aux blessés et aux malades un secours variant entre 0 fr. 50 et 1 fr. 50 par jour, plus 0 fr. 25 pour la femme et les enfans en bas âge, ainsi que les médicamens et les soins de plusieurs médecins ; 2° aux invalides une pension viagère de 1 franc à 1 fr. 50 par jour ; 3° aux veuves une pension de 0 fr. 75 par jour ; 4° enfin une retraite à tout ouvrier agi de cinquante-cinq ans et ayant un nombre d’années de service tel que, ajouté à ses années d’âge, le total soit de quatre-vingts ans au moins. D’après un rapport lu au conseil général du Gard (session d’août 1881), le montant des pensions proportionnelles et viagères dépasse, pour quelques-uns, 1,000 francs par an ; certaines indemnités de chômage, distribuées aux malades ou aux blessés, atteignent jusqu’à 2 fr. 50 par jour ; une haute paie de 0 fr. 50 et de 0 franc par jour récompense les vingt ou vingt-cinq années de service consacrées au travail de la mine ; enfin les vêtemens chauds sont donnés, dans l’hiver, aux ouvriers qui sont dans la gêne.
  2. En 1878, dit M. E. Dupont, elle avait ainsi en dépôt près de 1 million réparti entre plus de six cents personnes.