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l’édit avait été formellement abrogé par Louis XV (septembre 1739 ; et cette thèse juridique, qui ne reposait sur aucun fondement, fut aussitôt écartée. Les exploitant et les ouvriers se sont, en conséquence, passés du législateur. Un grand nombre de caisses sont nées et prospèrent sous ce régime de liberté. Toutes, à vrai dire, n’ont pas été conçues sur le même type, et ce défaut de symétrie choque, à coup sûr, un certain nombre de nos compatriotes ; nous n’avons pas, confessons-le, cet amour intolérant de la symétrie et nous nous soucions assez peu que l’état mette partout, en cette matière, la règle et le compas. Ce qui importe, c’est que les caisses vivent et que leurs formes diverses répondent aux besoins des diverses exploitations.

MM. Louis Reybaud, George Salomon, Burat, Vuillemin, Etienne Dupont et bien d’autres ont décrit tour à tour ces institutions de prévoyance que le libre accord des patrons et des ouvriers mineurs a fait jaillir, sur tous les points du territoire, du sol français. La compagnie d’Anzin, par exemple, — les lecteurs de la Revue ne l’ont pas oublié[1], — n’opère aucune retenue sur les salaires pour assurer aux mineurs des secours et des pensions ; elle se charge de toutes les dépenses. C’est ainsi qu’elle a déboursé directement pour un personnel de 12,230 ouvriers une somme de 1,312,829 fr. 24 en 1875, une somme de 1,388,052 fr. 51 en 1882. Dans cette dernière année, Liévin, en dépensant pour le même objet 281,304 fr. 31, a dépensé plus encore eu égard à sa production et au nombre de ses ouvrière. A Bruay (Pas-de-Calais), l’ancienne caisse de secours, alimentée par une retenue de 3 pour 100 sur les salaires, par une cotisation de la compagnie, etc., a été remplacée en 1872 par une caisse nouvelle à la charge exclusive des exploitans et qui supporte les dépenses de l’instruction publique, du service de la santé, des secours et des pensions. Courcelles, d’après ses statuts de 1878, retient chaque année sur le bénéfice net, après la répartition de 5 pour 100 au capital engagé, 1/10 pour le fonds de réserve et, sur cette réserve, applique2 pour 100 à la caisse de secours. Ostricourt retient aux ouvriers 2 pour 100 et verse une allocation égale de 2 pour 100. Dans presque toutes les autres caisses des bassins du Nord et du Pas-de-Calais, l’actif est composé par une retenue sur les salaires, qui varie de 2 à 3 pour 100, par une subvention de la compagnie qui varie de 1 à 2 pour 100 des salaires, par les amendes et par les intérêts des capitaux. Toutefois le conseil d’administration des mines de Bé thune a décidé, dans les premiers mois de 1884, que la compagnie prenait désormais à sa charge les trois quarts des

  1. Voyez la Revue du 1er novembre 1871.