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impulsion, il est des intermédiaires qui restent immobiles et que l’on a nommés quelquefois ponts ou arches.

Les secousses sont souvent accompagnées de bruits que l’on a comparés à celui que produiraient des voitures fortement chargées, roulant à allure vive sur un pavé ; quelquefois à des tonnerres souterrains et à des mugissemens ; mais l’intensité de ces bruits n’est nullement en proportion avec celle de l’agitation. Le grand tremblement de terre de Rio-Bamba du 4 février 1797 se fit en silence.

Ces bruits sont en rapport avec la nature des roches qui les transmettent. Les tremblemens de terre du nord du Chili, si fréquens à Coquimbo, en sont presque toujours précédés ou accompagnés, ce qui n’arrive pas pour ceux de la partie méridionale du même pays. D’un autre côté, il est des rumeurs souterraines qui ne sont pas associées à des secousses. Tels sont les bramidos ou rugissemens qui se sont succédé à Guanaxuato, au Mexique, en 1784, pendant plus d’un mois et qui causèrent l’épouvante et la fuite des habitans de cette ville. C’étaient des éclats secs et vifs comme ceux de la foudre, alternant avec de longs roulemens rappelant ceux d’un tonnerre éloigné : ce phénomène cessa graduellement. Tels sont aussi les bruits qui résonnent dans la haute région des Andes du Chili sans qu’on y ressente le moindre mouvement du sol. Au même titre, nous citerons encore l’Ile de Meleda, sur la côte de Dalmatie, près de Raguse, qui a offert l’exemple d’un nombre tout à fait extraordinaire de détonations, suivant le terme employé par ceux qui les ont entendues, en même temps que celui d’une longue répétition de secousses. Ces dernières commencèrent en mars 1822 et se continuèrent, avec de très courts intervalles, jusqu’en septembre ; puis elles reprirent en mars 1823, et furent particulièrement effrayantes pendant les mois d’août et septembre de cette même année. D’un autre côté, les détonations très nombreuses, quelquefois plus de cent en un jour, se produisirent aussi sans secousses. Ces deux effets, bien que n’étant pas toujours simultanés, dérivaient évidemment d’une cause unique, d’un même travail souterrain. En 1824, les bruits reparurent encore à Meleda pendant sept jours, du 14 octobre au 15 novembre, et une dernière fois, le 18 février 1826. Ce phénomène est unique dans le souvenir des habitans de l’Ile.

Les bruits associés aux tremblemens paraissent de la nature de ceux qui accompagnent les éruptions. Ces derniers se propagent sur des centaines de kilomètres, non par l’air, mais par le sol. Lors de l’éruption de 1877, au Cotopaxi, des détonations qui paraissaient partir des profondeurs retentirent moins distinctement au pied de la montagne qu’à Quito et à Guyaquil, c’est-à-dire à 350 kilomètres du volcan. Rien de connu en ce genre n’atteint les