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la légion étrangère, deux bataillons d’infanterie légère d’Afrique et deux compagnies de discipline. La colonie naissante allait donc servir d’exutoire à la mère patrie pour les scories de l’armée, comme elle l’était déjà pour l’écume de la population civile. Les compagnies de discipline étaient composées des incorrigibles qui avaient épuisé dans les régimens la série des punitions réglementaires ; les bataillons d’infanterie légère d’Afrique étaient alimentés par une source encore plus impure : ils recevaient les militaires frappés de condamnations et qui, graciés ou arrivés un terme de leur peine, rentraient dans les rangs pour accomplir leur temps de service. Ce sont ces bataillons qui ont acquis une certaine popularité sous le sobriquet de zéphirs. Pour ce qui est de la légion étrangère, les bons et les mauvais élémens s’y trouvaient confondus, mais les mauvais en plus grand nombre. Le 18 septembre 1831, un officier d’état-major inscrivait dans son journal la note suivante : « Nous avons un bataillon d’étrangers dignes de tenir compagnie au 67e. Ils sont débarqués depuis huit jours ; le premier, il a manqué trente-cinq hommes à l’appel du soir ; avant-hier, une compagnie tout entière s’est enivrée, et a battu ses chefs ; elle est tout entière au cachot ou à la salle de police, sauf deux, qui vont passer en conseil de guerre. » Heureusement, sous la main ferme de chefs résolus, les mauvais sujets finissaient par s’assouplir et se ranger ; s’ils ne s’élevaient pas au niveau des bons, ils subissaient néanmoins peu à peu leur influence et, selon les occasions, ils étaient capables de bien servir.

Une organisation nouvelle était donnée à la cavalerie ; une ordonnance royale du 17 novembre 1831 avait prescrit la formation de deux régimens de chasseurs d’Afrique, l’un pour Alger, l’autre pour Oran. Le premier devait avoir pour noyau les cavaliers des deux escadrons du 12e chasseurs de France qui demanderaient à rester en Afrique ; les chasseurs algériens supprimés étaient mis à la suite des escadrons français.

Le duc de Rovigo avait amené comme chef d’état-major le maréchal-de-camp Trézel ; le colonel Leroy-Duverger, qui occupait l’emploi sous le général Berthezène, consentit à se réduire aux fonctions de sous-chef. La division d’occupation était partagée en trois brigades commandées par les maréchaux-de-camp Buchet, de Feuchères et de Brassard ; le maréchal-de-camp de Faudons, beau-frère du général en chef, avait le titre de commandant et d’inspecteur permanent de la cavalerie d’Afrique ; le général Danlion continuait de commander la place d’Alger.

Dans l’administration civile, le changement était bien plus considérable ; à dire vrai, c’était une révolution. Casimir Perier,