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assurer le maintien, les kaïds et les cheikhs eurent à leurs ordres un certain nombre de spahis soldés à raison d’un franc par jour ; la solde mensuelle des kaïds était de 80 francs, celle des cheikhs de 60.

C’est par des soins d’un autre ordre que le général Voirol a recommandé d’ailleurs sa mémoire aux habitans d’Alger. Sur la colline de Moustafa-Pacha, au point culminant, s’élève une colonne de marbre ; l’inscription rappelle au passant que la route sur laquelle il chemine est l’œuvre du général, comme presque toutes celles qui rayonnent autour de la ville. Les terrassemens ont été faits, sous la direction des officiers du génie, par les troupes, les travaux d’empierrement par le service des ponts et chaussées. C’est aussi sous le commandement du général Voirol qu’a été entrepris le dessèchement des marais de l’Harrach, aux environs de la Ferme modèle et de la Maison-Carrée ; on y employait les compagnies de discipline, aidées de travailleurs indigènes. Enfin, le camp de Douéra, qui avait été construit l’année précédente, mais évacué au moment des pluies, fut occupé définitivement ; au mois de mai, la brigade du général Bro vint s’y établir. C’était le prélude d’une grande opération dans l’ouest de la Métidja.

Exaspérés par les incursions continuelles et les déprédations des Hadjoutes, les gens de Beni-Khelil et même de Beni-Mouça étaient disposés à se joindre aux Français pour les punir. Rendez-vous fut donné à leurs kaïds, le 17 mai, dans la nuit, aux ponts de Bou-Farik ; ils s’y rendirent avec 600 cavaliers. Le général Bro, parti du camp de Douéra, avait avec lui deux bataillons du 4e de ligne, un bataillon de la légion étrangère, 300 zouaves, 100 chasseurs d’Afrique et quatre pièces d’artillerie. Ses instructions lui prescrivaient de n’employer la force que si les Hadjoutes refusaient de venir à composition. Ils refusèrent. Le 18 mai, leur territoire fut envahi ; les auxiliaires arabes, qui marchaient les premiers, engagèrent le combat sans hésitation. Entre l’Oued-Djer et le Bouroumi s’étendait le bois de Kareza, refuge accoutumé des pillards ; on le fouilla, on y trouva une énorme quantité de bétail qui fut immédiatement réparti entre les auxiliaires. Le lendemain, la recherche allait être reprise quand un cavalier se présenta, demandant à être entendu. Le capitaine d’état-major Pellissier, le futur auteur des Annales algériennes, venait d’être nommé chef du bureau arabe. Assisté du sous-lieutenant Vergé, il alla trouver le parlementaire. L’Hadjoute assura que, si l’on voulait accorder la paix aux gens de sa tribu, ils s’engageaient à indemniser ceux de Beni-Khelil et même à recevoir un kaïd des mains du grand chef d’Alger. Le général Bro voulut qu’on le lui amenât ; il hésitait ; pour lui donner confiance, Vergé passa seul du côté des Hadjoutes.