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cherche à expulser les Chinois, et, par surcroît, de défendre l’accès des ports australiens à notre Compagnie des Messageries maritimes, qui fait depuis deux ans, au profit de notre commerce et à la satisfaction de ses passagers, les voyages mensuels de Marseille à Adélaïde, Melbourne, Sydney, et va de là à Nouméa. Ces voyages vont bientôt avoir lieu tous les quatorze jours.

A diverses reprises, notre ministre des affaires étrangères et chef du cabinet, M. Jules Ferry, a donné des explications au foreign office. Il l’a fait amicalement et a reconnu que nous avions aussi d’autres lieux de relégation en dehors de la Nouvelle-Calédonie et des îles Loyalty, qui en sont voisines à l’ouest. Nous avons la Guyane, dont, il est vrai, le climat est malsain, et où nous avons transporté, de 1852 à 1863, 3,430 condamnés de différentes catégories, hommes et femmes. Depuis, nous n’y transportons plus que les condamnés asiatiques et africains. Nous avons aussi les îles Marquises, qui ont déjà servi à la déportation, en 1850, des condamnés politiques, qu’on internait surtout à Noukahiva. Enfin on a trouvé des lieux de relégation en Algérie, à Lambessa, par exemple, et l’on pourrait en trouver d’autres, comme à l’île Phu-Quocq, en Cochinchine ; mais c’est surtout pour les quatre-cinquièmes à la Guyane et un cinquième à la Nouvelle-Calédonie, que le gouvernement français songe à confiner les récidivistes, si la loi que la chambre a votée sur cette question et qui a été soumise au sénat sur un rapport de M. de Verninac, est enfin acceptée. Au 25 octobre, le sénat a approuvé la loi en première lecture. L’Australie, d’ailleurs, n’a rien à voir dans nos affaires, et nous devons, quand il s’agit de nous et de nos colonies, rappeler aux autres que « charbonnier est maître chez lui. »

Quand le marquis de Normanby, ancien gouverneur de la colonie Victoria, est rentré en Angleterre, au mois juin dernier, il a communiqué à la reine une pétition signée, disait-il, par soixante-huit chefs de l’île Tanna, une des Nouvelles-Hébrides. Dans cette pétition, ils demandaient la protection de la reine Victoria contre la France et l’annexion de leur pays à l’Australie. En même temps, le cabinet de la Nouvelle-Galles du Sud préparait un projet de loi qui avait pour but d’empêcher le débarquement chez elle des déportés français à l’expiration de leur peine. Tout condamné libre où évadé qui se trouverait dans la Nouvelle-Galles du Sud serait passible d’emprisonnement, à moins qu’il n’ait les moyens de quitter le pays, et toute personne qui introduirait dans la colonie un condamné libéré, ou aiderait à son introduction ou le tiendrait caché, serait passible de peines très sévères. Enfin, le capitaine de tout navire faisant le commerce avec les colonies pénitentiaires françaises devait faire, en arrivant dans un port de