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par le choc contre de grands cuirassés, il faudrait des béliers assez grands eux-mêmes, qui auraient de la vitesse sans doute, mais n’auraient point l’avantage de l’exiguïté des dimensions. Et, comme nous l’avons dit, ces béliers, en écrasant leurs adversaires, risqueraient d’être rapidement démolis. Nous les remplacerons par des torpilleurs armés de torpilles portées. Ce seront des béliers d’un nouveau genre agissant par le choc de leur torpille contre le bâtiment attaqué et n’étant pas endommagés eux-mêmes par ce choc, car l’explosion de la torpille ne les atteint pas. Avec des affûts flottans, des canonnières de 14 cm, telles que celles que nous avons décrites dans un travail précédent, et des torpilleurs munis en outre d’un éperon, qui, à un moment donné et dans un cas extrême seulement, car cet éperon comme arme est très secondaire, leur permettra de se débarrasser d’un ennemi de leur échantillon, nous aurons réalisé d’une manière très suffisante la division du travail que nous poursuivons. Prenons donc le torpilleur de 41 mètres et de 71 tonneaux et la canonnière de 14 cm, ayant des vitesses de 20 à 21 nœuds, plus tard de 25, et voyons comment on pourrait les disposer pour la guerre maritime. Nous avons armé la canonnière de 14cm de deux canons au maximum, plus d’autant de hotchkiss que possible. Quant au torpilleur, il devra posséder deux tubes de lancement et deux torpilles pour chaque tube. Ces torpilles seront actuellement de 5m, 75 ayant une charge de fulmi-coton de 40 kilogrammes. L’éperon de l’avant aura pour effet de protéger les tubes de lancement en cas d’abordage ; en ce moment, ces tubes ont leur extrémité à fleur d’étrave, disposition fâcheuse, car ils peuvent être endommagés s’ils heurtent par l’avant un bateau en mer, une bouée dans une rade, un coffre, enfin un obstacle quelconque. En dehors de ces tubes de lancement, le torpilleur ne devra être chargé d’aucune autre arme, ni canons-revolvers, ni même fusils. C’est un torpilleur d’attaque, uniquement destiné à courir sus aux gros navires. Si on lui donnait un hotchkiss, comme on a déjà proposé de le faire, le capitaine risquerait d’être tenté de se battre avec un torpilleur ennemi, négligeant de la sorte le seul but qu’il doit poursuivre. Il sera donc facilement arrêté par un torpilleur ennemi ? dira-t-on. Il le serait, en effet, ou du moins il pourrait l’être si on l’envoyait seul au feu. Mais, à côté du torpilleur d’attaque, nous placerons un torpilleur qu’on pourrait appeler torpilleur de défense, dont la fonction sera de faire la chasse aux torpilleurs ennemis, afin de déblayer le terrain pour son camarade de combat. Le torpilleur de défense n’aura pas de tube de lancement, c’est-à-dire pas de torpille Whitehead. Son armement se composera de trois ou quatre hotchkiss d’aussi fort modèle qu’on pourra et d’une torpille portée au bout d’une hampe.