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Mais si l’on tient compte des prises d’eau d’irrigation, dont le débit restera toujours uniforme, et des moteurs à mouvement continu, tels que les machines élévatoires, qui absorberont plus des deux tiers de la force, on reconnaîtra qu’un dénivellement de 0m, 10 au plus, qui ne saurait avoir aucune influence sur le service de la navigation, sera largement suffisant pour parer à l’inégalité du travail des moteurs purement industriels, qui resteront libres de marcher à leur volonté et de reporter sur le jour la force qu’ils auront économisée pendant la nuit.

Quant à la différence physique qui parait exister entre la houille et la puissance mécanique d’une chute d’eau, elle est plus apparente que réelle. La chaleur, la lumière, l’électricité ne sont, en fait, que des manifestations différentes d’une même force motrice. Théoriquement, elles peuvent être transformées l’une dans l’autre. Pratiquement, le problème est déjà résolu pour l’électricité, qui, par l’intermédiaire de la machine Gramme, peut à volonté résulter d’une transformation de force motrice, ou se transformer en force motrice ou en lumière. La question est peut-être moins avancée pour l’identification industrielle de la force motrice et de la chaleur. Si la houille se transforme en force motrice, la force motrice ne pourra sans doute pas reproduire la houille elle-même, mais on pourra, quand on le voudra, la reconstituer en chaleur et même en combustible.

Par l’intermédiaire de l’électricité, on arrivera aisément, en effet, à décomposer l’eau en ses deux élémens, l’hydrogène et l’oxygène, dont l’utilisation distincte trouverait certainement dans les réactions chimiques de la métallurgie un emploi bien plus avantageux que ne peut l’être aujourd’hui celui de la houille.

Il n’y a donc de ma part aucune exagération à identifier tout au moins les deux sources d’action mécanique, à admettre que dans toute localité où l’on pourra aménager une chute de 5 mètres de hauteur sur un canal d’un débit de 120 mètres cubes à la seconde, on aura par le fait créé une valeur industrielle équivalente à celle de 160,000 tonnes de houille d’une valeur annuelle de 4 millions.

Quand on voit chez nous, et plus encore dans les pays de grande industrie, comme l’Angleterre, les villes industrielles et manufacturières se créer tout d’une pièce, au voisinage du puits d’extraction : d’un bassin houiller, dans des régions souvent désertes, inaccessibles, où tout manque, parfois jusqu’à l’emplacement plan, nécessaire à l’installation de l’usine, qui pourrait mettre en doute que de vastes quartiers industriels s’élèveront rapidement au voisinage de nos centres de population déjà existons, du jour où l’on aura la certitude de trouver sur place, en même temps que des voies de