Sydenham, l’opposition avait encore gagné du terrain et mis le ministère en minorité : le 15 septembre 1842, MU. La Fontaine et Baldwin prêtaient serment comme premiers ministres, cinq membres de l’ancien cabinet conservèrent leur portefeuille, à la condition d’accepter la politique libérale. Pour la première fois, les Canadiens entraient dans la place, passaient de l’opposition au gouvernement.
Tout n’est pas fini cependant : indigné qu’on préfère les rebelles aux loyaux, le parti tory, sous la conduite de sir Allan Mac-Nab, se prépare à la lutte. Un puissant auxiliaire lui survient dans la personne de sir Charles Metcalfe. L’homme à la volonté de fer, comme on a surnommé ce gouverneur, subit avec peine le joug constitutionnel, et, dès l’abord, affecte de se soustraire à ce qu’il regarde comme une négation du pouvoir de la couronne ; bientôt il se brouille avec les ministres, nomme à des emplois publics leurs adversaires et prétend n’être pas obligé de les consulter. MM. Baldwin et La Fontaine, ayant refusé d’adhérer à cette théorie, donnèrent leur démission, et, après neuf mois d’interrègne ministériel, Metcalfe forma, le 6 septembre 1844, avec MM. Viger et Draper, un ministère incolore qui ne put se soutenir qu’en s’appropriant plusieurs des réformes projetées par son prédécesseur. C’est pendant cette administration que le rétablissement de la langue française dans les actes législatifs fut officiellement demandé à la métropole, que les exilés politiques rentrèrent dans leur patrie et qu’on régla la question des biens des jésuites : malgré l’opposition des évêques, le parlement décida que le revenu de ceux-ci serait réparti entre les collèges catholiques et protestons. En perspective d’une guerre entre l’Angleterre et les États-Unis, on vota aussi une loi sur la milice. Le temps, cette fois, faisait son œuvre de tassement, d’oubli, d’apaisement, les Canadiens français se montrèrent les plus ardens à organiser la défense du territoire, et, dans un discours patriotique où il rappelait les exploits de 1812, le docteur Taché prononça ces paroles significatives : « Si le gouvernement a cru voir un symptôme de désaffection générale dans l’acte de quelques centaines d’hommes qui ont pris les armes en 1837-1838, poussés au désespoir par des administrations flétries et condamnées par les premiers hommes d’Angleterre, le gouvernement s’est trompé : quatre-vingt-dix à cent mille hommes, composant la milice canadienne, étaient là et n’ont pas bougé ; ils ont continué à souffrir, à attendre, à espérer… Ce que nos pères ont fait, ce que nous avons fait nous-mêmes pour la défense de cette colonie, nos enfans seraient encore prêts à le faire si l’on voulait rendre justice au pays. Notre loyauté, à nous, n’est pas une loyauté de spéculation, de louis, schellings et deniers ; nous ne l’avons pas constamment