M. Cuvillier, que l’élection du président devait se faire librement ; et indépendamment du pouvoir, que la loi n’exigeait pas l’approbation du gouverneur, qui, comme la présentation, n’était qu’une cérémonie fondée sur un simple usage. Le gouverneur reconnut encore à la dissolution, qui fut suivie d’une agitation sans précédent : nouvelles arrestations de journalistes, destitutions en masse, adresses de félicitations des marchands anglais à lord Dalhousie, pétition monstre revêtue de plus de quatre-vingt mille signatures contre lui. Par une heureuse coïncidence, une crise semblable venait d’éclater dans le Haut-Canada, où le parti libéral cherchait aussi à secouer le joug de L’oligarchie, et l’intervention d’une province tout anglaise donna plus de poids aux remontrances que MM. Neilson, Viger et Cuvillier allaient porter à Londres. Une discussion solennelle eut lieu à la chambre des communes. Déjà M. Hume avait fait entendre ces paroles mémorables : « Il s’agit de savoir comment ces colonies sont gouvernées. Le gouvernement ne met-il pas tout en œuvre pour les irriter et les porter dans leur désespoir à tout entreprendre ? Pourquoi avons-nous, à l’heure qu’il est, six mille soldats au Canada, si ce n’est pour tenir le peuple de force sous la puissance d’un gouverneur qu’il hait et méprise ? » M. Huskisson, ministre des colonies, dissimula la question des finances et fit bon marché des griefs des colons, en même temps qu’il couvrait les gouverneurs et cherchait à exciter l’orgueil britannique : « Il est de notre devoir, dit-il, et de notre intérêt, de répandre des sentimens anglais au Canada et de lui donner le bienfait des lois et des institutions anglaises. » Il terminait en proposant la nomination d’un comité chargé d’une enquête générale. « L’acte de 1791, répondit M. Labouchère, est la grande charte des libertés canadiennes ; ai l’intention de Pitt et des législateurs de son temps avait été mieux suivie, le Bas-Canada serait parvenu à la prospérité qu’on lui destinait et jouirait d’une situation tranquille. Sir James Mackintosh formula avec précision les maximes d’une bonne politique coloniale : protection pleine et efficace contre l’influence étrangère, liberté complète aux colons de conduire leurs propres affaires et de régler leur industrie, sauf l’obligation de fournir une somme, raisonnable au gouvernement impérial en paiement des dépenses faites pour eux. Il rappela ensuite qu’en 1827 l’assemblée avait adopté vingt et un projets de loi, tous rejetés par la chambre haute ; des vingt-sept membres qui composaient celle-ci, dix-sept remplissaient des charges lucratives dépendant du bon plaisir du gouverneur, et prélevaient par an 15,000 livres sterling sur le budget ; avec ce corps, l’équilibre constitutionnel devenait impossible.. « Comment admettre, ajoutait-il, que les quatre-vingt mille Anglais du Bas-Canada puissent prévaloir sur plus de quatre
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