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est remplacé tout de suite, le traitement vacant du mort sera appliqué au vivant, et la dépense du bureau restera la même. Mais si le remplacement ne se fait qu’au bout d’un mois ou deux, il y aura eu un traitement de moins à servir, et la dépense du bureau aura été moins forte. La mise à la retraite, qui est la mort administrative, a les mêmes conséquences budgétaires que la mort naturelle. Ceux qui prévoient tout ont prévu le cas de mort naturelle ou administrative. Ils ont considéré qu’il n’y avait pas de bureau qui, bon an mal an, ne profitât de quelque boni apporté par la mort d’un des siens. Ils en ont conclu qu’après avoir établi la dépense engagée, c’est-à-dire la dépense à faire pour payer tous ceux qu’on emploie, il fallait en déduire une fraction qui correspondrait aux vacances d’emploi. On constitue donc un personnel en activité dont les traitemens absorberont plus d’argent qu’il n’en est porté au budget. Les ministres sont autorisés à employer des agens dont ils ne pourraient pas payer les appointemens s’il ne se faisait pas de vide dans les rangs. C’est comme si le ministre achetait en Amérique du tabac pour une somme supérieure au montant des crédits qui lui sont ouverts pour cet objet, sous prétexte qu’un naufrage est toujours possible et qu’il peut arriver que la régie ne reçoive pas la totalité des tabacs qui auront été achetés.

Raisonner ainsi, c’est nier notre constitution financière, c’est violer la loi de 1817, c’est mettre à néant tous les principes. Il ne serait pas d’ailleurs sans inconvénient d’encourager les administrations à laisser vacans les emplois hormis le cas où le personnel est surabondant. Ce serait alors un moyen de réduire le personnel par extinction sans toucher aux cadres. On laisserait temporairement sans titulaire un emploi qu’on ne supprimerait pas. Il serait plus conforme à la règle et plus efficace de modifier les cadres et de ramener le personnel au nombre qui serait considéré comme suffisant, mais en même temps comme nécessaire. La conséquence d’une réduction des cadres serait l’obligation de remplacer immédiatement tous ceux qui cesseraient leurs fonctions pour une raison ou pour une autre. Le cadre étant réduit au minimum nécessaire, tous les emplois devraient être toujours occupés pour que la besogne pût marcher. Il est vrai qu’on ferait disparaître par cette méthode le boni des vacances d’emploi et qu’on ruinerait en même temps toute la théorie vicieuse de la déduction à faire aux budgets pour tenir compte des vacances, ce qui ne serait pas un mal.

Le troisième inconvénient du système de réduction des crédits jusqu’à concurrence des annulations antérieures par suite de vacances d’emploi ou pour toute autre cause, est de consommer à l’avance la dotation naturelle des crédits supplémentaires. On se condamne