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REVUE DRAMATIQUE

Porte-Saint-Martin : Théodora, drame en 8 tableaux, de M. Victorien Sardou.

Restaurateur de Byzance, voilà le nouveau titre que M. Victorien Sardou, de l’Académie française, a voulu mériter pour honorer davantage ses confrères des Inscriptions et des Beaux-Arts. Il avait permis récemment, pour la gloriole, qu’on reprit les Pattes de mouche ; dans la maison de Molière, à défaut des Premières Armes de Richelieu : innocente coquetterie d’auteur, qui se plaît à montrer d’où il est parti, avant de montrer où il est parvenu. Pour la gloire, et pour faire ainsi mesurer sa carrière, M. Sardou aurais pu demander qu’on reprit à la Porte-Saint-Martin Patrie ou la Haine ; il a résolu de faire plus : il a produit Théodora. Comme il avait triomphé de Bruxelles et de Sienne, en réparateur de cités, de même il a prétendu triompher de Byzance : Victoriano Bruxellensi, Senensi, Byzantino ; telle serait la dédicace d’un arc de triomphe, élevé un jour sur la voie Victorienne ; moins près du Théâtre-Déjazet que de l’Institut.

Assurément cette ambition était noble et permise au dramaturge qui avait évoqué de l’histoire les Pays-Bas du XVIe siècle et l’Italie du XIVe. Cependant M. Sardou, lorsqu’il avait conçu Patrie et la Haine, ne s’était pas d’abord avisé de ces évocations. Avant de s’établir dans le décor des Pays-Bas, Patrie s’était logée à Venise et puis transportée à Londres ; avant d’émigrer, pour s’y fixer, dans l’Italie de Dante, la Haine, sans sortir de France, avait passé du temps de la Fronde au temps de la Ligue ; et puis remonté jusqu’à Charles VII. L’auteur lui-même a narré ces vicissitudes. C’est qu’avant de prendre « un corps, » ainsi qu’il l’a dit, en excellens termes, chacune de ces pièces avait « une