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sous forme de sables et d’argiles, destinés à s’accumuler dans les terrains de sédimens.


IV

Les eaux de la mer rongent incessamment les rochers de la côte, minent les falaises, balaient les grèves, et au grand désespoir des ingénieurs, démolissent souvent les digues et jetées qu’on élève dans certaines rades. Ce pouvoir destructeur, contre lequel peu de matériaux sont protégés, devient redoutable dans certains parages : par exemple, au Fort-Boyard sur l’océan, non loin de Rochefort, à l’embouchure de l’Adour et près du port de Cette. Continuellement fouettés par les vents, les flots supérieurs sont en contact perpétuel avec l’atmosphère, et enfin, la vie animale et végétale se développe avec exubérance dans les fonds sous-marins. De toutes ces causes réunies il résulte qu’en sus des matières dissoutes dont nous venons de parler et qui sont contenues à haute dose, beaucoup de substances plus rares se rencontrent aussi dans l’océan : ces minéraux, ces gaz, ces débris organiques sont souvent difficiles à reconnaître, quelquefois presque impossibles à doser, mais ne jouent pas moins un rôle important. Nous ne traiterons bien entendu que des faits les mieux connus et les plus intéressans, tout en laissant dans l’ombre bien d’autres points.

Dans ce qui précède, on a pu entrevoir un phénomène curieux d’accumulation, mais cette faculté est absolument insignifiante, si on la compare à l’énorme pouvoir absorbant de certaines algues, comme les varechs ou les fucus. C’est dans les cendres de varechs que le salpêtrier Courtois découvrit l’iode en 1812 ; c’est dans les fucus que Malaguti, alors professeur à la faculté de Rennes, reconnut, à la suite de recherches laborieuses, la présence du cuivre, du plomb, de l’argent et du fer, métaux qu’il retrouva plus tard dans l’eau de mer elle-même.

L’iode a été signalé treize ou quatorze ans avant le brome, bien qu’il soit aussi peu abondant relativement à lui que le brome l’est par rapport au chlore. La dose d’iode contenue dans l’eau salée est à peine appréciable, même avec des réactifs sensibles, au point que plusieurs médecins ont nié son rôle thérapeutique dans l’action générale des traitemens par cette eau à l’hôpital de Berck. Néanmoins, attiré et condensé par certaines plantes, il devient assez abondant pour pouvoir en être extrait avec avantage ; il s’accumule également dans les organismes animaux, puisque l’huile de foie de morue doit ses propriétés bienfaisantes à l’iode qu’elle contient.