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y proposa un bill pour l’abolition de l’esclavage. Après avoir débuté commerçant, il finit ministre congrégationaliste. Le second de ses treize enfans, William, fut le grand-père de Grover Cleveland. Ce William, horloger et orfèvre, fut en son temps réputé pour un très honnête et très habile artisan. Destinant son fils, Richard Falley Cleveland, à l’état ecclésiastique, il l’envoya au collège de Yale, où il fut gradué en 1824. Richard épousa, en 1829, Anne Neale, fille d’un libraire d’origine irlandaise et d’une quakeresse allemande de Philadelphie, et, après un court séjour en Virginie, vint s’établir, en 1834, comme ministre de l’église presbytérienne dans le village de Caldwell (New-Jersey).

C’est là que naquit Stephen Grever Cleveland, le cinquième des enfans de Richard. Il avait trois ans lorsque la famille émigra à Fayetteville (New-York). Le jeune Grover fit ses premières études à l’école du district, passa une année à l’académie, puis entra comme apprenti chez un marchand. Son père ayant été appelé à Clinton (du même état) comme agent d’une mission américaine avec un traitement de 5,000 francs qui parut amener la fortune dans cette humble maison, Grover put reprendre ses études. En 1853, nouveau déplacement, le père de Grover étant envoyé à Holland Patent, près d’Utica. L’installation à peine terminée, le chef de la famille mourut subitement, ne laissant rien que de jeunes enfans à la charge des aînés. Grover avait seize ans. Par son frère William, professeur dans une institution d’aveugles à New-York, il obtint un petit emploi dans cette maison et consacra désormais ses heures de liberté à l’étude de la langue latine et de la littérature anglaise. Nous le retrouvons, un an plus tard, chez sa mère, cherchant vainement une place à Utica et à Syracuse et prenant la résolution d’émigrer à l’ouest. Il s’arrête à Buffalo, chez un oncle, éleveur de bestiaux, qui le lait travailler à la préparation du prochain volume d’un manuel d’agriculture. Ce séjour, de provisoire, devint définitif, et quelques études de droit permirent à Cleveland d’entrer à dix-huit ans comme clerc dans un cabinet d’affaires. Au bout de quelques semaines, son assiduité et le sérieux de son travail lui valent 80 francs par mois. En 1859, il est admis au barreau et ses patrons élèvent peu à peu son traitement mensuel à 250 francs. On lui offre une place d’attorney-adjoint du district dans le comté d’Erie. La position était honorable, mais peu rétribuée, et Grover avait à soutenir sa mère. Il l’accepta pourtant, et bien lui en prit. L’attorney en titre lui laissant toute la besogne, le public commença bientôt à apprécier l’ardeur laborieuse du jeune légiste et ses qualités de débuter devant le tribunal. Ses biographes le représentent, à cette époque de sa vie, étudiant ses. dossiers jusqu’à trois heures