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capitulation. Le roi avait a été à Canossa. » Il se soumit à toutes les conditions des vainqueurs. Pourtant on ménagea les formes. Les ministres entrèrent au storthing, mais seulement après que le storthing eut voté, sous une nouvelle rédaction, une proposition qui reçut immédiatement la sanction royale. Pour satisfaire à la constitution qui exige que la présentation et le vote des modifications constitutionnelles soient séparés par une élection, il ne fut pas difficile de trouver parmi les nombreuses propositions des années précédentes un texte qui remplît les conditions requises. La société de l’armement national reçut les allocations que le storthing avait votées, mais après le vote d’un nouveau crédit également sanctionné par le roi. Enfin les administrateurs désignés par le storthing entrèrent à la commission des chemins de fer, mais en vertu d’une nomination royale. La question du veto et des droits du storthing avait disparu, ou plutôt elle était ajournée. L’objet du conflit semblait s’évanouir. C’était bien sur ces bases que le ministère Schweigaard avait essayé de transiger sans y parvenir. Tant il est vrai que les questions de personnes tiennent toujours le premier rang dans les conflits politiques! Toutefois, le roi ne dut pas se borner à accepter M. Sverdrup et ses collègues : il dut subir leur programme. La sanction royale fut donnée à deux résolutions qui tenaient à cœur au storthing et qui étaient sur le point de faire naître de nouveaux conflits. L’une d’elles est celle qui décide que les administrateurs de district (lensmœnd) seront nommés sur une liste de présentation dressée par les conseils locaux. C’est mettre l’administration aux mains des corps électifs; les ministères précédens avaient considéré cette loi non seulement comme fatale, mais comme inconstitutionnelle, parce que l’administration appartient au roi seul d’après la constitution. Le storthing l’avait votée trois fois, et il était à craindre qu’elle ne donnât lieu à un nouveau vote dans les termes de celui du 9 juin. L’autre loi est une extension du suffrage. Seront désormais électeurs tous ceux qui ont un revenu de 800 kroner (1,120 fr.) dans les villes et de 500 kroner (700 fr.) à la campagne; le nombre des électeurs sera ainsi accru de 50 à 60 pour 1 00, et cet accroissement profitera surtout aux ouvriers des villes. C’est le suffrage universel ou peu s’en faut. M. Sverdrup ne rencontre plus de résistance. Il annonce des réformes dont il dresse la liste. Il est à l’œuvre. On saura bientôt si le parti radical est capable de gouverner, et quel avenir il prépare à la Norvège.


V.

Le conflit est terminé. Mais il serait bien téméraire de supposer que les difficultés sont aplanies. Le régime créé par la constitution