dante. Peu de jours après, ce vote significatif n’est point démenti dans les élections du sénat. C’est donc une situation nouvelle qui trouve naturellement son expression dans un ministère catholique et indépendant élevé au pouvoir pour représenter la majorité récemment élue par le pays. C’est la plus simple loi du régime parlementaire. Les libéraux ne se tiennent pas pour battus, ils crient à la surprise, au subterfuge : c’est aussi leur droit, c’est le droit de tous les partis vaincus. Seulement, à peine revenus de l’étonnement de leur défaite, les libéraux ont commencé à se remuer, à se livrer aux démonstrations violentes, à exciter toutes les passions libérales et même révolutionnaires contre ce qui était après tout l’œuvre du pays. Le ministère formé sous la présidence de M. Malou, avec M. Jacobs, M. Wœste, M. de Moreau, M. Bernaert, a trouvé devant lui, non plus simplement une opposition légale facile à prévoir, mais une agitation organisée qui est devenue une sorte de sédition le jour où le nouveau gouvernement a eu l’idée de présenter une loi d’enseignement destinée à réformer la loi scolaire des libéraux. Le ministère s’est-il montré bien prudent avec sa loi sur les écoles primaires ? N’aurait-il pas mieux fait d’éviter tout ce qui pouvait avoir un air de réaction, tout ce qui pouvait ressembler à une politique de représailles ? Ce qui est arrivé depuis prouve bien que, si le ministère était dans son droit en présentant une loi qui a été après tout votée par le parlement, il eût été plus habile en se montrant plus modéré. Toujours est-il que les libéraux se sont fait aussitôt une arme de cette nouvelle loi scolaire pour exciter les inquiétudes et propager l’agitation. Ils ont eu les grandes manifestations qui ont dégénéré parfois en violons conflits des rues, les compromis et remontrances des bourgmestres, les pétitions bruyantes et menaçantes, les démonstrations sur le passage et devant l’hôtel des ministres. Ils ont essayé de circonvenir le roi Léopold pour lui imposer, sous une pression révolutionnaire, le désaveu d’une majorité librement élue, la dissolution d’un parlement né de la veille. Les libéraux ont mené hardiment la campagne agitatrice, et ils n’ont surtout rien négligé pour se préparer une revanche. Cette revanche sur laquelle ils comptaient, qui eût été, dans tous les cas, plus significative si elle n’eût été précédée de toutes les scènes violentas des derniers mois, ils viennent de l’obtenir par les élections municipales, qui se sont accomplies il y a quelques jours, le 19 octobre. Ils ont eu d’évidens avantages dans cette élection partielle des communes ; ils ont eu du moins la victoire en ce sens qu’ils ont gardé toutes leurs positions, particulièrement dans les grandes villes. Le ministère aurait pu sans doute, jusqu’à un certain point, faire observer que rien n’était changé, que les élections municipales n’avaient d’ailleurs rien de commun avec les élections législatives, que la majorité restait dans le parlement ce
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