de ce secours, Marguerite put se remettre en route. Le Vendôme elle vint au château de Plessis-lès-Tours. « Votre fille n’en partira pas, écrivait de Paris Bellièvre à Catherine, sans voir bien clair à sa sûreté. Il faudra du temps à consolider la plaie, et l’on ne fera pas faire au roi de Navarre ce que l’on pense. »
Si Bellièvre tenait un pareil langage, c’est qu’il venait d’avoir un entretien avec M. de Clervant, l’un des familiers du Béarnais. « Le roi votre maître, avait dit Clervant, devrait déclarer qu’il a été trompé par des rapports calomnieux ; il devrait rappeler sa sœur à la cour et l’y traiter avec de tels égards qu’elle y fût honorée et respectée. » Bellièvre ne cacha pas à Catherine que c’était sa manière de voir, « car il étoit à craindre que le temps ne rendît cette laffaire plus difficile encore. »
Marguerite, du Plessis-les-Tours, se rendit à Poitiers. Nous la retrouvons en septembre et en octobre à Cognac. Dans cette dernière ville, elle reçut une lettre de son mari, lui intimant l’ordre de ne pas entrer dans ses états tant qu’une pleine et décisive explication ne lui aurait été donnée. Marguerite alla donc attendre à Agen ce qui serait décidé d’elle. Une autre cause motivait cette injonction sévère : oubliant Bazerne, oubliant Le Rebours et Fosseuse, ces caprices d’un jour, le Béarnais s’était épris de Diane d’Audouin, veuve de Philibert de Gramont, la belle Corisande. « Il est plus passionné que jamais de la comtesse, écrivait un contemporain, de sorte qu’il ne la peut abandonner, et elle le remue comme bon lui semble. Tout le monde dit et croit, connaissant sa liberté d’esprit et son peu de fermeté en affaires d’amour, qu’elle l’a charmé. On pense qu’il y a de la fascination. »
Lors de la rentrée de Henri III à Saint-Germain-en-Laye, Aubigné vint de nouveau, au nom du Béarnais, demander compte de l’insulte faite à la reine sa femme. Catherine, qu’il vit la première, lui dit d’une voix aigre : « On fera mourir tous ces coquins, tous ces marauds, qui ont offensé ma fille. — Pour une telle expiation il faudrait des têtes plus nobles, » répliqua Aubigné. Henri III ne lui fit pas meilleur accueil. « Allez retrouver votre maître ; il prend le chemin de se mettre sur les épaules un faix qui feroit plier celles du Grand Seigneur. »
Lassé d’attendre une réponse tant de fois remise, le roi de Navarre s’empara de Mont-de-Marsan. De son côté, usant de représailles, le maréchal de Matignon, qui avait succédé à Biron dans le gouvernement de la Guyenne, renforça la garnison de Bazas. Le moment était mal choisi pour la négociation de M. de Bellièvre. Il s’arrêta à Podensac, où était Matignon. Après s’être concertés, ils se décidèrent à doubler les garnisons de Condom, d’Agen et de Dax. Renfermer le roi de Navarre dans un cercle de fer leur sembla l’unique