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même sujet, affirmait au contraire qu’il y avait plusieurs canots et citait des noms se rapportant à ceux de la première expédition. M. Hale dut reconnaître dans ce récit une sorte de confusion. Il constate que le dialecte de la Nouvelle-Zélande ne s’écarte pas moins que celui de Taïti de la langue de Samoa, bien que les différences ne portent pas sur les mêmes locutions. Chaque idiome a poursuivi sa marche indépendante en s’éloignant du type originel, mais la déviation est presque égale. Ainsi, l’auteur estime que les migrations à la Nouvelle-Zélande et à Taïti sont à peu près contemporaines, et il admet qu’un temps assez long doit s’être écoulé pour que le langage, la mythologie, les croyances religieuses se soient modifiés de façon à prendre en chaque région une forme particulière.


II

Les études de George Grey, venant répandre une sorte de clarté sur l’histoire du peuple qui habite la Nouvelle-Zélande, réveillèrent l’attention. Différens auteurs ont essayé de pousser plus loin la recherche. En s’appliquant à recueillir les traditions des Maoris, ils ont entendu partout des récits analogues, mais avec des nuances infinies dans les détails. La mémoire de la grande migration de Hawaïki est générale ; ensuite, selon les narrateurs, son importance est plus ou moins considérable ; on varie sur le nombre des canots qui composaient la flottille. Si l’on compare toutes les informations, il semble probable que des groupes arrivèrent les uns à la suite des autres. Dans l’ensemble, on n’énumère pas moins de treize canots dont on cite les chefs. Une première embarcation vint sous la conduite de Kupé, un personnage fameux qui apparaît comme dans un rôle providentiel. Kupé aborde à Wanganui, de nos jours le port Nicholson. Jugeant le pays délicieux, il retourne à l’île Hawaïki en informer ses compatriotes. La description qu’il trace d’Aotea, — ainsi nomme-t-il la Nouvelle-Zélande, — parut si séduisante, que sans retard, une flottille de six canots fut armée pour en prendre possession. Une légende donne au voyage de Kupé un motif assez étrange. Des dissensions qui régnaient sur la terre d’Hawaïki furent l’origine de l’abandon de l’île par un groupe de guerriers. Kupé possédait une pierre précieuse que lui disputait un compatriote. Il partit avec son trésor et rencontra l’île du Nord, Aotea, mais dans la crainte d’être atteint par son ennemi, il alla plus loin et vint atterrir sur la côte occidentale de l’île du Milieu, à l’endroit qui reçut le nom d’Arahura. Il enfouit sa pierre de jade en un lieu où elle devait toujours demeurer. A son retour, plusieurs familles résolurent de se rendre au pays dont les agrémens avaient ravi le voyageur.