aux troupes intrépides qui défendaient la côte du Parana sous les ordres du général Mansilla, détournée encore en 1848 par le mouvement qui entraîne toute l’émigration française vers les mines de Californie, elle commença à se développer après 1852. Chaque année, depuis, a constaté un progrès, et l’on pourrait fournir une longue liste de noms français qui marquent le chemin parcouru des points élevés où la fortune les a placés : combien de domaines de six, dix, douze, vingt lieues carrées entre des mains qui n’ont apporté comme instrument de fortune qu’une modeste bêche, sans savoir toujours très bien la manier ! Un de ceux-là ne possède-t-il pas, en dehors d’autres propriétés considérables et d’énormes troupeaux, un domaine de 200 lieues carrées, 540,000 hectares, sur la côte de l’Atlantique, aux confins de la province de Buenos-Ayres ?
L’industrie pastorale a cet avantage séduisant de produire de gros revenus sans peine ni travail ; le troupeau des pampas, donnant ainsi sa laine, joue le rôle de l’esclave antique travaillant pour son maître, l’enrichissant et lui laissant de précieux loisirs. Nos nationaux semblent cependant n’être entrés qu’avec hésitation dans cette industrie ; ils redoutent les ennuis de cette vie contemplative ; ils partagent le goût inné de notre race pour les relations sociales, quelque banales qu’elles soient, et recherchent les réunions et les longs bavardages. Aussi ont-ils toujours préféré la vie des villes ou des villages où l’on trouve quelqu’un à qui parler, avec qui discuter les questions politiques et sociales. Le plus grand nombre du reste possède un métier, s’il n’est commerçant, et préfère s’en tenir à l’outil connu et ne pas mettre sa patience à l’épreuve de la vie pastorale. En revanche, le nombre est considérable de ceux qui, depuis les premiers colons attirés dans l’Entrerios en 1854 par le général Urquiza, se sont consacrés à l’agriculture ; on peut dire même que ce sont eux qui l’ont implantée dans la pampa et l’ont amenée aux progrès considérables qu’elle a réalisés depuis quelques années. Ceux-là, n’osant, au début, s’éloigner, redoutant l’inconnu de la plaine, avaient commencé par le jardinage à la porte des villes, où, malgré les haies épaisses de cactus et d’aloès infranchissables, les hantaient les légendes d’Indiens armés de lances, ou de gauchos dangereux, cauchemars d’autant plus horribles qu’ils apparaissaient à leur imagination sous les traits épouvantables que leur prêtaient les naïves lithographies aperçues aux vitrines, le long des rues. Bientôt rassurés, ils comprirent que le blé a plus à redouter des sauterelles que des Indiens et apportèrent leur précieuse collaboration à la grande culture aujourd’hui si prospère.
Mais où leur rôle a plus d’importance encore, c’est dans la