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d’autant plus extrême que ces îles seront plus éloignées des continens. Ainsi, pour le sujet qui nous occupe : la Nouvelle-Zélande et les îles adjacentes, on devra tirer une conclusion d’une grande portée des faits que nous avons signalés touchant la végétation et le monde animal.

Un jour, nous avons exposé devant l’Académie des Sciences les preuves de l’effondrement d’un continent austral pendant l’âge moderne de la terre ; on s’empressa de rappeler des idées qu’on supposait analogues, déjà émises par certains naturalistes. Il y avait pourtant peu de rapports entre nos résultats acquis par des comparaisons aussi complètes que le permettait l’ensemble des documens obtenus par une patiente recherche, et des vues nées d’observations peu nombreuses, parfois mal assurées, souvent interprétées selon l’imagination. En présence d’événemens qui ont bouleversé les terres du sud de l’Océan-Pacifique, il reste intéressant, en vérité, de suivre un moment les auteurs dans la voie où ils se sont engagés.

Au siècle dernier, navigateurs et géographes croyaient à l’existence d’un continent dans l’espace compris entre l’Australie et l’Amérique australe. Le capitaine Cook, apprenant au monde qu’en ces parages il n’existe que deux grandes îles et des îlots, la surprise fut générale. On se figura qu’il fallait chercher le continent austral sous de plus hautes latitudes. Crozet, le narrateur du triste voyage de Marion, déclare que la Nouvelle-Zélande lui apparut comme une immense montagne qui autrefois aurait fait partie d’un vaste continent. En 1872, un savant de la colonie néo-zélandaise, le capitaine Hutton, après des études de géologie et de zoologie, entretint le public des phases successives de son pays d’adoption[1]. A son avis, les hautes montagnes de la Nouvelle-Zélande n’ont jamais été submergées. Il admet sans trouble d’esprit qu’à une époque très reculée, la Nouvelle-Zélande communiquait avec l’Australie, l’Afrique et l’Amérique, mais qu’elle en a été séparée avant l’apparition des mammifères ; on serait mal avisé si l’on prétendait obtenir de l’auteur la moindre preuve d’un caractère scientifique. M. Hutton voit, en d’autres temps, la terre australe comprenant toutes les îles tropicales et ne détendant pas au nord jusqu’aux îles Hawaï ; il se fonde sur l’existence en Australie, à la Nouvelle-Calédonie, aux îles Fidji et même dans l’archipel Indien, à l’époque du trias, du genre dammara, dont le type, le fameux pin kauri, demeure de nos jours particulier à l’île de Te-Ika-a-Mawi. Selon M. Hutton, pendant la période jurassique, la Nouvelle-Zélande se trouvait reliée à l’Australie. Depuis, il y eut des alternatives de dépression et de soulèvement, et, par deux fois, elle n’aurait

  1. Transactions of New Zealand Institut, Ve volume, page 227.