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encore à Ischl entre l’empereur Guillaume et l’empereur François-Joseph. L’entrevue de cette année paraît avoir eu un caractère particulier d’intimité et de cordialité. Le vieil empereur Guillaume a été l’objet des démonstrations les plus affectueuses. L’impératrice Elisabeth d’Autriche assistait à la réception. Le ministre des affaires étrangères de l’empereur François-Joseph, le comte Kalnoky, accompagnait son souverain, et le chef du cabinet hongrois, M. Tisza, avait même été appelé à Ischl, où il paraît avoir eu une conversation avec l’empereur Guillaume. D’un autre côté, M. de Bismarck, qui ne voyage guère cet été, qui ne s’est pas même annoncé à Gastein, devait cependant se mettre en mouvement d’ici à peu et se rencontrer avec M. Kalnoky. Est-ce à dire que ces voyages, que ces rencontres de souverains ou de chefs de chancelleries aient une importance particulière, surtout une signification inquiétante au moment où nous sommes ? La visite de l’empereur Guillaume à Ischl, aussi bien que l’entrevue où se rencontreront M. de Bismarck et le comte Kalnoky, n’a sans doute d’autre objet que de confirmer ou de renouveler cette alliance austro-allemande qui est entrée depuis bien des années déjà dans la politique européenne. Peut-être aussi a-t-il été ou sera-t-il question de la conférence de Londres, de l’attitude que les deux puissances se proposent de garder, selon les circonstances, dans les affaires d’Egypte. Dans tous les cas, cette alliance des deux empires, confirmée ou renouvelée par les souverains comme par les ministres, n’a visiblement à l’heure qu’il est rien de menaçant ni pour la paix ni pour la France, à qui M. de Bismarck paraît témoigner depuis quelque temps une bienveillance un peu inattendue. Le fait est que, si l’alliance austro-allemande n’a rien d’inquiétant pour la France, la France, de son côté, n’est pas dans des conditions à pouvoir inquiéter le chancelier de Berlin, le chef tout-puissant et invariable de la politique allemande.

Les pays libres, c’est pour eux un honneur comme aussi quelquefois un danger, sont voués à d’incessantes agitations ; ils vivent par la lutte et dans la lutte, sans que les questions qui les divisent soient jamais résolues définitivement. Les vainqueurs du scrutin sont à peine en possession du pouvoir que déjà les vaincus s’agitent pour ressaisir d’une manière ou d’une autre la victoire qu’ils ont perdue le plus souvent par leur faute, pour créer des embarras à leurs adversaires. C’est une fois de plus l’histoire d’un petit pays voisin, et l’histoire ne manque pas d’intérêt. Que se passe-t-il effectivement en Belgique ? Il y a quelques semaines tout au plus, le pays est consulté à quelques jours d’intervalle pour le renouvellement d’une partie de la chambre des représentans et d’une partie du sénat. Les élections se font, on ne le conteste pas, dans des conditions de liberté complète. Le scrutin inflige un échec signalé aux libéraux qui ont le gouvernement depuis