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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 août.

Le hasard a vraiment d’étranges ironies. C’est le 4 du présent mois d’août, pour l’anniversaire d’une des plus mémorables scènes de la révolution française à son aurore, c’est ce jour-là même que s’est réuni à Versailles le congrès appelé à réviser la constitution de 1875, la douzième constitution, ni plus ni moins, expérimentée par la France. Entre le premier, le grand 4 août de 1789, dont on évoquait l’autre jour si naïvement ou si gauchement le souvenir, et ce dernier, ce triste 4 août de 1884, auquel nous venons d’assister, il s’est écoulé déjà tout près d’un siècle. La France a certes fait du chemin pendant ce temps. Elle a connu toutes les extrémités de la fortune, toutes les épreuves des révolutions et des guerres, les illusions les plus démesurées et les plus cruels mécomptes. Elle a passé alternativement par tous ces régimes de la monarchie, de la république ou de l’empire, sans s’arrêter même sous les gouvernemens réparateurs et bienfaisans qu’elle a eus par intervalles, poussée sans cesse à des aventures nouvelles. Surmenée et trompée tour à tour par les partis, elle a recommencé périodiquement la même histoire, et elle finit par arriver à bout de chemin exténuée, lasse d’agitations, découragée, ne sachant plus à quelle constitution se vouer pour vivre en paix. Une seule chose est évidente à travers tout, c’est que, dans cette carrière où les partis jouent perpétuellement avec les destinées du pays, ni les idées, ni les mœurs publiques, ni les caractères, ne se sont assurément élevés. On parle souvent du progrès ! Il est singulier, le progrès, et il y a bien de quoi rattacher ce malencontreux Il août qu’on vient de voir, à l’ancien, au grand 4 août qui a inauguré la révolution française ! On peut mesurer la route