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tenir compte de tous les élémens dont se compose le passé pour conjecturer l’avenir, il est juste de noter cette circonstance, que le refroidissement polaire, et plus tard celui de l’Europe, se sont compliqués d’une extrême abondance de précipitations aqueuses, d’une humidité excessive qui, après avoir favorisé l’ancienne végétation, a été ensuite une cause active de la formation, puis de l’extension des glaciers. Cette cause, après avoir été prépondérante lors de l’abaissement définitif du climat circumpolaire, a évidemment disparu. Elle ne se reproduirait pas en Europe, si, par suite de quelque aménagement défavorable des terres et des mers, le refroidissement se prononçait de nouveau. L’abondance des pluies extra-tropicales est un des traits décisifs du passé de notre globe, et le phénomène semble maintenant épuisé, après avoir joué un rôle des plus considérables. La zone d’aspiration, celle qui pompe la chaleur humide et la distribue dans les hautes régions de l’atmosphère en la dirigeant vers les pôles, au moyen des contre-alizés, cette zone est maintenant restreinte en pouvoir comme en étendue. Tout au plus si ses effets se propagent un peu au-delà des tropiques sur quelques points déterminés, par exemple, en Chine, au Golfe-Persique, sur le pourtour de celui du Mexique et, en Europe, sur un point limité du Portugal. Les continens se sont agrandis et exhaussés, enfin de larges espaces dénués de pluies s’interposent en Afrique, en Arabie, au nord du Caucase et dans le centre de l’Asie, comme autant d’obstacles à la marche et à la propagation régulières des pluies tropicales. Au total et en dehors des pluies locales ou régionales qui dépendent de la proximité des mers, la masse d’eau autrefois déversée en précipitations aqueuses, et que l’atmosphère contenait à l’état de vapeurs, a beaucoup diminué, circonstance qui explique en dehors de tout le reste l’indigence relative de la végétation européenne, comparée à ce qu’elle était anciennement. Les glaciers, dont l’extension fut la principale cause de ce que la période quaternaire eut d’excessif, sont partout en décroissance. Ils ne sont plus qu’à l’état de résidus ; peut-être même sont-ils sur la voie d’une disparition totale. Les déversemens d’eaux pluviales s5épanchant sous l’influence des courans équatoriaux, en contact direct avec les contre-courans polaires, ont produit leurs derniers effets à la fin du tertiaire, mais ce contact n’ayant plus sa raison d’être et la zone des pluies générales se trouvant à la fois restreinte en étendue et réduite en intensité, n’entrerait plus comme facteur dans les conséquences d’un refroidissement futur. — Sans doute, en se plaçant au fond de l’avenir, et sous l’influence d’un phénomène encore imparfaitement défini, les zones polaires s’élargiront de nouveau et les zones tempérées