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après Heer, cette question intéressante, adopte les conclusions de celui-ci et admet la présence, à cette époque reculée, d’un climat absolument uniforme, d’un degré égal d’humidité et de chaleur dans le sud de l’Europe aussi bien qu’au Spitzberg, par 78 degrés de latitude nord.

La même égalité s’étendait-elle au reste du globe, et faut-il croire que les régions équatoriales participaient à cette uniformité des conditions climatologiques ? Quelques découvertes de plantes houillères trouvées au Brésil et sur la côte orientale d’Afrique pourraient le faire penser. Pourtant ce ne sont là que des indices épars et en conséquence incertains, justement parce qu’ils ont quelque chose d’exceptionnel. Un coup d’œil d’ensemble montre les gisemens carbonifères et le terrain houiller productif distribués, avec-une remarquable abondance relative, à partir du 40e degré de latitude nord. La zone principale des charbons exploités dans les trois continens s’étend du 43e au 60e degré ; mais plus loin, et jusque dans l’extrême Nord, comme nous venons de le voir, malgré la difficulté des explorations, on observe encore des gisemens houillers assez riches et assez fréquens pour donner à croire que, tout considéré, la végétation carbonifère avait son principal siège sur les terres de l’hémisphère boréal situées au nord du 40e degré et s’avançait de là, sans autre interruption que celle des mers interposées, jusqu’aux environs immédiats du pôle.

L’Australie, et par conséquent les terres de l’hémisphère Sud, paraissent avoir été dès lors moins riches et moins étendues. Dans l’espace intermédiaire, où de grandes régions émergées existaient certainement soit au Brésil, soit au sud de l’Himalaya, soit au centre de l’Afrique, la rareté des gisemens indiquerait plutôt des colonies de végétation, isolées et circonscrites, qu’un peuplement continu et universel dont on constaterait les traces. Peut-être la chaleur était-elle encore trop forte sous l’équateur pour que les végétaux pussent s’y développer ailleurs que sur quelques points limités ; ou bien y avait-il là une « zone d’aspiration » élevant des masses d’eau à l’état de vapeurs pour aller ensuite les déverser, sous forme de pluies incessantes et torrentielles, sur les deux hémisphères. Il aurait pu se faire, dans ce dernier cas, qu’il y eût eu absence ou rareté de précipitations aqueuses sous les tropiques ; mais, en revanche, excès et continuité de ces mêmes précipitations au-delà des tropiques. Les contre-alizés, plus puissans, plus constans, plus étendus dans leur action, plus chargés de vapeurs tièdes, les auraient distribuées en averses incessantes sous nos latitudes et au nord de celles-ci. Les pluies tropicales connues sous le nom de « moussons » et de saison d’hivernage ne seraient alors qu’un reste, affaibli et cantonné dans d’étroites limites, d’un