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lières avec le Vatican, pour avoir, comme par le passé, un représentant de la Belgique auprès de la cour de Rome, et ce n’était là qu’une conséquence assez naturelle de la victoire du parti catholique. Le ministère, dès son avènement, a tenu à faire revivre des traditions de bons rapports avec l’église, qui, jusqu’à ces derniers temps, n’avaient jamais paru incompatibles avec les libertés belges. Tout cela n’a rien que de simple et de conforme aux sentimens comme aux habitudes de la nation belge. L’acte le plus significatif et le plus grave du cabinet de M. Malou jusqu’ici, c’est la nouvelle loi organique de l’enseignement primaire qu’il a proposée pour remplacer la loi de 1879, et ici encore, après tout, on ne peut pas dire qu’il y ait une surprise, puisque la reforme de cette loi de 1879 était dans tous les programmes des candidats qui ont triomphé aux élections dernières.

La faute des libéraux, et ils l’expient aujourd’hui, a été de faire, en 1879, une loi de parti et de secte, d’introduire dans cette loi un esprit de centralisation et de vexation qui répugne aux mœurs comme aux sentimens d’un pays tel que la Belgique, de violenter les droits des communes, les droits des pères de famille aussi bien que les croyances religieuses. Ils n’ont pas vu, ils n’ont pas voulu voir qu’en procédant ainsi, ils livraient d’avance leur œuvre aux chances d’inévitables réactions. C’est ce qui est arrivé. Et qu’on voie par cet exemple le danger qu’il y a toujours à mettre l’esprit de parti ou de secte dans des questions qui devraient être traitées et résolues avec la plus souveraine impartialité ! Lorsque les libéraux belges ont fait leur loi scolaire de 1879, ils ont abusé de leur pouvoir dans un intérêt de domination, et les catholiques n’ont pas caché que le jour où ils reviendraient aux affaires, leur premier acte serait d’abroger ce qu’ils ont appelé une « loi de malheur. » Aujourd’hui, ce sont les catholiques qui sont au gouvernement, qui proposent une loi nouvelle où ils mettent naturellement leurs idées, et déjà, dans les premières délibérations des bureaux de la chambre, les libéraux protestent à leur tour que le jour où ils rentreront au pouvoir, ils se hâteront d’abroger la loi qu’on va faire. Avec ce système que deviennent les intérêts les plus essentiels, les plus sérieux d’un pays ? Ils restent sans garanties, perpétuellement livrés à toutes les représailles, sacrifiés d’avance à l’esprit de faction. Cela arrive dans d’autres pays que la Belgique I Si le nouveau ministère de Bruxelles veut accomplir une œuvre durable, ce qu’il a de mieux à faire, c’est de se dégager de ces malfaisantes influences de parti, de réformer dans les lois scolaires ce qui peut être utilement réformé, sans se laisser aller à de dangereux conseils de réaction. C’est la politique la plus éclairée et c’est encore la politique la plus sûre en Belgique comme dans tous les pays.

La question est la même partout, en effet, à Bruxelles aussi bien qu’à