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extérieur, pour 1883 et pour les six premiers mois de 1884, des diminutions bien autrement importantes que celles que M. Marteau s’est plu à relever, en ce qui concerne l’Italie, pour 1882. Le Saint-Gothard n’entre pour rien là-dedans, ou, s’il y entre, c’est pour une somme insignifiante, et c’est à la crise, la crise financière, économique qu’il faut s’en prendre. C’est la liquidation du krach de 1882 qui amène tous ces déficits, lesquels réagissent sur les transports de nos chemins de fer. En 1883, le Paris-Lyon-Méditerranée, ancien réseau, a perdu 6 fr. 24 pour 100 sur ses recettes de 1882 ; le Midi, 2 fr. 57 ; le Nord, 1 fr. 79 ; l’Orléans, 1 fr. 15 ; l’Est, 0 fr. 78 ; l’Ouest, 0 fr. 46. La concurrence du Saint-Gothard n’a rien à voir dans tout cela, non plus que dans les moins-values sur le montant de nos évaluations budgétaires ou sur le rendement de toutes les contributions directes et indirectes. C’est à 13 millions que le déficit s’est élevé sur le revenu des contributions pour le semestre de janvier à juin 1884, et, pour notre commerce extérieur, à l’importation et à l’exportation, le déficit total est de 107 millions, pour ce même semestre comparé au semestre correspondant de 1883. Là, et non dans le Saint-Gothard, répétons-le, est la cause prédominante de la diminution de notre commerce. Il faut reconnaître aussi que les salaires sont, chez nous, devenus trop élevés, et, par conséquent, que le prix de revient de nos fabrications est maintenu trop haut relativement à celui de l’étranger. Les frais de manutention des marchandises dans nos ports, sur nos quais, sont aussi trop onéreux. Enfin, par l’effet même des expositions internationales, de l’extension des communications rapides par les chemins de fer, les navires à vapeur et les télégraphes, de la diffusion des découvertes scientifiques, la production est devenue partout trop forte, a dépassé les besoins de la consommation, et, de là, une crise économique qui est à peu près universelle et qui ne frappe pas seulement la France, mais encore l’Angleterre, l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, les États-Unis et d’autres pays.

Quant à ce qui concerne spécialement le tunnel du Saint-Gothard, nous pourrons lutter avec assez d’avantage par l’abaissement des tarifs communs de transit international. C’est sur ce point seulement que la lutte peut être ouverte et que nous devons la poursuivre à tout prix. Mais il faut d’abord bien s’entendre sur ce qu’on appelle le transit. Ceux qui croient que le transit se fait par le Saint-Gothard entre Londres et Brindisi, bien mieux, entre Londres et l’extrême Orient, et que nous serons ruinés si ce transit, si la malle de l’Inde nous échappe, ceux-là se trompent étrangement. Le transit dont ils parlent ne se fait que par le canal de Suez ou par le cap de Bonne-Espérance. Il touche, dans la Méditerranée, à Trieste,