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non les détails, faciliteraient, par des dédoublemens sagement ménagés, la formation des corps nouveaux, auxquels on ne peut échapper, en temps de guerre, sous peine de noyer les anciens corps dans la masse trop considérable des hommes rappelés ou même appelés pour la première fois au service. C’est d’ailleurs une nécessité que l’on a déjà comprise, car on a prévu, en cas de mobilisation, le dédoublement d’un certain nombre d’unités, des batteries d’artillerie en particulier. La réduction du nombre des corps d’armée ne serait pas une cause d’affaiblissement, puisqu’ils seraient plus forts, mais elle donnerait le moyen de composer à l’avance, sans augmentation de personnel ni de dépenses, les états-majors des armées elles-mêmes. C’est ce qu’on ne pourrait faire en ce moment qu’en désorganisant les états-majors divisionnaires ou de corps d’armée.

Un autre avantage, et fort notable, serait de pouvoir porter immédiatement sur la frontière menacée un nombre de troupes suffisant pour lui donner une protection efficace, permettre à la mobilisation de se faire sans danger, et garantir les habitans de dévastations méthodiques destinées à enlever au pays les ressources indispensables aux armées défensives. D’après les décisions prises, les corps d’armée ne doivent se mettre en mouvement qu’après avoir été complétés par l’arrivée des réservistes et s’être munis de tous les accessoires qui peuvent leur être nécessaires : parcs d’artillerie, vivres de rechange, ponts de bateaux, ambulances, services auxiliaires, train et bagages. Si l’ennemi envoie des coureurs ou une avant-garde légère, il faut pourtant aviser ; il faut aussi que rien ne vienne troubler l’œuvre si compliquée de la mobilisation et de la concentration des troupes. On ne peut disposer, pour obtenir un peu de sécurité, que du petit nombre des troupes non comprises dans la composition des corps d’armée, quelques bataillons de chasseurs ; et ce n’est pas assez ; c’est d’autant moins qu’il leur faudra partir incomplets : aussi a-t-on cru devoir leur adjoindre la cavalerie indépendante. Autrefois, lorsqu’il fallait faire des courses rapides, on jugeait que c’était le rôle de la cavalerie légère. Maintenant, comme elle est presque entièrement répartie dans les corps d’armée, on est obligé de faire remplir le service de coureurs par les cuirassiers, qui n’y sont pas du tout propres. Lorsqu’une organisation d’armée conduit à de semblables conséquences, elle est jugée, et il ne faut pas hésiter à la modifier. Notre cavalerie est mieux montée qu’avant la guerre, on l’exerce avec beaucoup de soin ; il serait bien à regretter qu’elle fût compromise au début par de mauvaises mesures.

L’artillerie a de nombreux détachemens ; c’est la perte de cette arme où les hommes ne se forment que par l’instruction donnée dans les