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que le personnel tout entier relèverait d’une seule autorité et recevrait directement les ordres et les instructions du gouvernement.

Tels sont, en substance, les argumens que les partisans de l’exploitation par l’état firent valoir dans l’enquête. Quelques-uns d’entre eux, pour répondre aux objections qui leur étaient adressées, soumirent à la commission des plans pour la réorganisation du ministère des travaux publics et une série de changemens à introduire dans la législation, afin de rendre l’administration des chemins de fer indépendante des vicissitudes de la politique. L’analyse de ces propositions serait sans intérêt ; passons donc aux raisons invoquées en faveur de la remise des chemins de fer à l’industrie privée.

Il est, tout d’abord, un point sur lequel la commission se trouva unanime dès le début de son examen. Elle s’accorda à repousser l’idée que l’exploitation des voies ferrées fût une fonction de l’état. Si grande que soit l’importance économique, politique et militaire des voies ferrées, si précieuses que celles-ci soient pour l’Italie, où elles remédient aux défauts de la configuration du territoire, il n’en résulte point que l’état ait le droit et l’obligation d’assumer l’exploitation des chemins de fer, comme il a l’obligation et le droit de rendre la justice, de pourvoir à la tranquillité intérieure et à la sécurité du pays, en un mot, d’exercer les droits et de remplir les devoirs inhérens à sa souveraineté. L’assimilation qu’on voudrait établir entre ces fonctions légitimes de l’état et l’exploitation des chemins de fer n’est exacte ni scientifiquement ni pratiquement. Elle repose sur une conception erronée de l’état et de son rôle ; elle découle des théories socialistes qui se sont développées hors de l’Italie, qui rapportent tout à l’autorité de l’état et qui tendent à faire revivre sous une forme nouvelle l’ancien absolutisme dont les sociétés modernes ont eu tant de peine à s’affranchir. Se refusant à entrer dans une discussion purement théorique, la commission décida que la question des chemins de fer ne pouvait être posée de cette façon, et qu’elle-même en devait chercher la solution, non dans une conception abstraite, mais dans un examen impartial du caractère réel de l’exploitation des voies ferrées, des résultats de l’expérience, et des conditions présentes de l’état italien. Le rapport de M. Genala envisage successivement ces trois points en condensant les argumens et les faits recueillis dans l’enquête.


I

Quel caractère la loi reconnaît-elle à un exploitant de chemins de fer ? Elle le considère comme un commerçant et l’assujettit au code