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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 mars.


Ce ne sont pas certes les questions sérieuses et même les points noirs, comme on disait autrefois, qui manquent pour le moment dans la politique de notre pays. Dût-on considérer comme une dernière fortune les succès qui étaient dus, qui ne pouvaient manquer à notre petite armée du Tonkin, entrée aujourd’hui victorieusement dans Bac-Ninh, ces succès ne sont pas sans mélange, puisqu’ils sont loin d’être le dénoûment d’une entreprise engagée un peu au hasard. En dehors de cette satisfaction de voir de vaillans soldats porter au loin le drapeau, les difficultés deviennent, en vérité, assez nombreuses et assez pressantes pour créer une de ces situations où les esprits les plus confians n’envisagent plus sans crainte, sans émotion, le lendemain.

Les difficultés, elles sont partout. Elles ne sont pas seulement dans l’isolement diplomatique fait à la France au milieu des luttes d’influence qui se partagent l’Europe, elles sont encore plus peut-être dans nos affaires intérieures. Elles sont dans les finances, épuisées par un système d’imprévoyantes dépenses et toujours menacées par les entrepreneurs de réformes meurtrières. Elles sont dans ces grèves, qui mettent en mouvement des populations surexcitées, égarées par les déclamateurs, qui sont comme l’expression douloureuse et redoutable d’une crise profonde du travail et de l’industrie. Elles sont dans ces discussions sur cette loi municipale, sur ces lois scolaires, qui brouillent tout et confondent tout, qui montrent le sénat lui-même se contredisant d’un jour à l’autre, votant la publicité des séances des conseils communaux après l’avoir repoussée et faisant de simples assemblées locales de petits parlemens. Les difficultés, elles sont dans presque tout ce qui se fait aujourd’hui. Et si, au milieu de