Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 62.djvu/438

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

volonté populaire, avaient pris les devans par le rétablissement du stathoudérat de leur province en faveur du fils de Guillaume II. Les autres provinces ne pouvaient suivre cet exemple : trois d’entre elles, la Gueldre, Utrecht et Overyssel, étaient en partie conquises et leurs états ne pouvaient se réunir. Les deux autres, la Frise et Groningue, avaient conservé comme stathouder, sous la tutelle de sa mère, le jeune fils de leur ancien gouverneur, Henri-Casimir de Nassau. Quant aux états-généraux, ils s’empressèrent de mettre en harmonie avec les nouveaux pouvoirs du prince d’Orange les attributions du commandement en chef telles qu’elles devaient désormais lui appartenir. Le vendredi 8 juillet, sur la proposition des états de Hollande, sous la présidence du député Horenkom, en présence de vingt-cinq députés, ils reconnurent le prince d’Orange comme capitaine et amiral-général de la république, nommé à vie et ayant, à ce titre, sous ses ordres, avec le libre usage de son commandement, l’armée et la flotte des Provinces-Unies. Cinq commissaires de leur assemblée, représentant les provinces qui n’étaient pas conquises par l’ennemi et dont les députés pouvaient dès lors continuera siéger dans l’assemblée fédérale, lui furent envoyés pour lui donner connaissance de la résolution qui joignait le pouvoir militaire dans toute sa plénitude au pouvoir civil dont il était désormais investi.

Aux félicitations officielles qui lui étaient adressées se joignirent celles de sa grand’mère, la princesse douairière, heureuse dans sa vieillesse d’avoir assez vécu pour voir le descendant de la maison d’Orange recouvrer les charges qui avaient appartenu tour à tour à son mari, Frédéric-Henri, et à son fils, Guillaume II. « Je suis de ceux, écrivait-elle à son petit-fils, qui avaient fort tardé à vous souhaiter le bonheur de toutes les charges que cet état vous a données. Je vous plains que c’est en ce temps que tout est en trouble, mais j’espère que Dieu vous assistera. Je vous souhaite la patience et la constance de votre grand-père, et je ne doute pas, quand vous demanderez à Dieu son assistance, qu’il vous bénira en toutes choses. »

Le jeune prince recueillit également le témoignage de satisfaction et les encouragemens que le vieux maître chargé de l’éducation religieuse de son enfance, Cornélius Trigland, lui fit parvenir à son lit de mort : « Je prie Dieu, lui écrivait-il, pour que Votre Altesse reste sérieusement attachée, comme elle l’a toujours été, à la religion chrétienne réformée et qu’elle suive les maximes de ses illustres prédécesseurs. Si je ne dois plus revoir votre personne, vous penserez que je vous ai servi avec toute fidélité et que je vous appris le fondement du bonheur, celui avec lequel sont morts tous les saints de l’ancien et du Nouveau-Testament, et qui est réservé à Votre Altesse si elle bâtit dessus. Je prie que Dieu vous donne tous les