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moyen de filets traînans et de dragues. Le naissain produit par les moules est si abondant, qu’on voit fréquemment, notamment dans l’étang de Berre, le banc se reformer dès que la drague y a passé. Il arrive parfois cependant que les bancs sont envahis par les sables et détruits. C’est pour obvier à cet inconvénient et pour s’assurer une production constante que l’on a tenté dans diverses localités de pratiquer l’élevage des moules sur bouchots. Cette industrie a été introduite par un Irlandais nommé Patrick Walton, qui, ayant fait naufrage en 1235 dans la baie d’Aiguillon (Vendée), s’y établit comme pêcheur et y construisit le premier bouchot. On donne ce nom à un appareil fixe formé de pieux verticaux enfoncés dans le sol, s’élevant dans la mer à une hauteur de 2m, 40 et reliés entre eux par des claies et des fascines. Cet appareil, qui a la forme d’un V, dont les branches ont de 200 mètres à 800 mètres de longueur et dont la pointe est dirigée vers la mer, est destiné à recueillir le naissain et à fixer les jeunes moules entraînées par les eaux. A Aiguillon, les bouchots sont établis sur plusieurs rangs successifs et parallèles les uns aux autres ; ils s’étendent sur une longueur totale de 140 kilomètres. Le naissain est d’abord recueilli sur les bouchots d’aval, puis transporté, enveloppé dans de vieux filets, sur les bouchots d’amont, où il se fixe et se développe jusqu’au moment où la moule devenue comestible peut être livrée au commerce, c’est-à-dire lorsqu’elle a deux ans. On évalue le produit annuel de cette baie à 15 millions de kilogrammes d’une valeur de 450,000 francs.

On a cherché à transporter sur d’autres points du littoral cette industrie simple et lucrative ; mais, comme elle exige, d’une part, que l’établissement soit protégé contre les flots du large, d’autre part, qu’il se trouve à proximité d’une moulière naturelle qui fournisse le naissain, et que ces conditions sont assez difficiles à rencontrer, elle ne s’est pas généralisée autant qu’on pourrait le supposer. M. Léon Vidal, qui a publié une Monographie de la moule, a essayé d’en établir dans la Méditerranée sans avoir pu y réussir à cause des tarets qui perforaient les pieux. Il a pratiqué alors la culture des moules par bancs en recueillant le naissain sur des pierres, des cordages et des fascines placées à proximité des moulières naturelles et en le transportant ensuite dans les fonds à repeupler. Il évalue à 10,000 hectares environ l’étendue qui, sur le littoral méditerranéen, pourrait, presque sans mise de fonds, être transformée en moulière. La pêche des moules, en 1881, a fourni 506,394 hectolitres, représentant une valeur de 1,822,610 francs.

Comme la moule, l’huître est un mollusque bivalve qui s’attache au rocher, où il reste fixé pour la vie. On en rencontre dans presque toutes les mers, à proximité des embouchures où la nourriture est