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ceux-ci seulement, et particulièrement de ceux qui habitent nos eaux, que nous avons à nous occuper.

Les rivages français se trouvent répartis entre différentes mers de la manière suivante : Océan Atlantique, 940 kilomètres ; Manche, 840 ; Pas de Calais, 80 ; Méditerranée (continent), 600 ; Corse, 450. — Total, 2,910 kilomètres.

En évaluant à 6 kilomètres la largeur sur laquelle l’homme peut, à partir du rivage, exercer son action, largeur qui limite les eaux nationales, on obtient une surface de 1,746,000 hectares. En y ajoutant, pour les embouchures maritimes des fleuves, 15.000 hectares ; pour les étangs salés ou saumaires du littoral, 94,034 hectares, on arrive au total de 1,855,034 hectares, qui constitue le domaine de la pêche française proprement dite.

Les poissons de mer sont pour la plupart ichtyophages ; ils se dévorent les uns les autres en prodigieuses quantités, mais la reproduction en est elle-même si considérable que, pris dans son ensemble, le nombre n’en diminue pas. Il paraît donc superflu de leur appliquer les procédés de fécondation artificielle dont nous avons parlé à propos des poissons d’eau douce. Sans doute cette fécondation serait possible, et rien ne s’opposerait à ce que, comme pour ces derniers, on provoquât l’embryonnement des œufs extraits de la femelle en projetant sur ceux-ci la laite du mâle. Mais ces œufs et les alevins qui en sortent sont si petits, que nulle trame n’est assez serrée pour les retenir ; aussi les quelques tentatives d’éclosions factices qu’on a pu faire ont-elles été abandonnées. C’est donc plutôt par des mesures de protection destinées à empêcher les abus que par une action directe sur la reproduction que l’on parviendra à conserver aux mers leur fertilité.

Des diverses espèces de poissons dont nous tirons parti pour notre consommation, les unes sont migratrices, les autres sédentaires. La migration des animaux, dont les naturalistes de tous les temps se sont préoccupés, est une conséquence de la question des subsistances. Les uns voyagent pour fuir la disette ou chercher une nourriture plus abondante, les autres poussés par l’instinct de la reproduction qui les dirige sur les points où leurs petits trouveront un milieu favorable et des alimens appropriés à leur nature. Il en est ainsi des poissons, dont les uns, comme les saumons et les aloses, remontent les fleuves pour frayer en eau douce, dont les autres comme les harengs, les morues, les sardines, font leurs migrations en pleine mer, en se rapprochant plus ou moins du rivage à la poursuite des proies vivantes dont ils se nourrissent. La plupart des poissons migrateurs vivent en troupes et, comme les animaux hibernans, s’engourdissent dès que la température de l’eau vient à s’abaisser. Quand arrive l’hiver, ils cherchent un abri contre le froid