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Il y a théoriquement deux solutions du problème : l’emploi des balles lourdes et grosses lancées sans trop de force ou celui de balles légères et fines lancées violemment. En Angleterre, on a adopté franchement les balles lourdes : le fusil Martini-Henry a un calibre de 11 millimètres 1/2 environ et donne à la balle une vitesse de 416 mètres; le fusil allemand (Mauser), ainsi que la plupart des autres, a un calibre de 11 millimètres et donne une vitesse de 440 mètres au projectile. Seul le fusil italien a un calibre de 10 millimètres 1/2 environ; mais, comme il donne une vitesse de 430 mètres, son tir n’a pas beaucoup de portée, sa trajectoire est peu tendue et sa précision est faible aux grandes distances.

On préconise aujourd’hui l’adoption d’un calibre de 9 à 10 millimètres, auquel correspondrait une vitesse initiale comprise entre 500 et 600 mètres. Dans ces conditions, le soldat pourrait porter 100 cartouches pesant moins que 80 d’aujourd’hui. Il est même probable qu’on arriverait à alléger son fusil en le raccourcissant, par exemple, et en le réduisant à la longueur d’une carabine ou d’un mousqueton, à condition de renoncer au tir sur deux rangs et au combat à la baïonnette, à condition aussi d’atténuer le recul beaucoup plus violent avec une arme légère qu’avec une arme pesante. On a proposé d’absorber en partie le choc par des ressorts ou par des plaques élastiques interposés entre la crosse et l’épaule du tireur.

Dans l’état actuel de la balistique, les deux termes extrêmes sont le calibre de onze millimètres et demi (11.1/2) avec une vitesse de 400 mètres (nombre rond) ou le calibre de neuf millimètres (9) avec une vitesse de près de 600 mètres. Les termes intermédiaires auxquels la plupart des nations se sont arrêtées ne correspondent à rien : leur adoption a été quelque chose comme une affaire de mode. Ce que la Prusse a fait, l’Autriche l’a voulu faire, et la France, et la Hollande, et la Russie, et il s’est trouvé que c’est par un de ses moins bons côtés qu’on lui a ressemblé.


IV.

Le terrain, ce semble, est un peu déblayé. Des considérations forcément arides qui précèdent doit ressortir la nécessité de deux principales qualités bien distinctes : la rapidité de chargement, d’une part, et, de l’autre, un ensemble de propriétés balistiques comprises sous le mot un peu vague de précision. La précision se compose, comme on l’a vu, de deux élémens : de la justesse qui permet d’atteindre le point qu’on a visé, et de la tension qui permet d’en atteindre d’autres.

De ces deux ordres de qualités qu’on doit chercher à développer