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« Le titre dont les trois puissances se servent pour partager la Pologne est si odieux et si décrié qu’il fera toujours un tort infini à la réputation des trois souverains et que leurs noms en seront flétris dans toute l’histoire. Je pouvais procurer à Votre Majesté, par la paix de Reichenbach (on voit qu’il conserve jusqu’au bout ses illusions) les villes de Dantzig et de Thorn, ainsi que le district entre la Netze et la Warthe... Votre Majesté renonça à cette acquisition légitime,.. pace qu’on lui fit croire bonnement que les Polonais n’y consentiraient jamais... » Quant à la France, Hertzberg propose au roi de Prusse « de faire passer une déclaration publique à la convention française pour lui proposer, au nom des alliés, de la reconnaître, à condition que tout soit rétabli sur le pied qui a subsisté avant la guerre... » (Juillet 1794.) Dans une deuxième lettre, Hertzberg insiste sur « l’impassibilité absolue de détruire la nouvelle république française… » Il ajoute en soulignant: « On dit communément : Avec qui doit-on faire la paix en France? C’est toujours avec celui qui a le pouvoir en main et qui ne se laissera pas vaincre par toutes les puissances coalisées, selon l’expérience de tant d’années. » (Juillet 1794.) *

Le roi fut dur pour cet ancien serviteur; la lettre qu’il écrivit en réponse à ces avertissemens est qu’elle, peu digue d’un souverain qui avait usé si longtemps des services de Hertzberg. Elle est assez courte pour être citée en entier. « Au comte de Hertzberg, à Berlin. Il fut un temps où vous remplissiez un devoir en me soumettant votre opinion sur les affaires que je confiais à votre zèle. Aujourd’hui que votre carrière diplomatique est finie, je vous eusse tenu compte de la discrétion qui m’eût épargné des conseils dont je ne fais cas qu’autant que je les demande. Laissez aux ministres que ma confiance prépose aux intérêts autrefois commis à vos soins celui de recevoir mes ordres et de les exécuter. Je sais apprécier le patriotisme et j’aime à croire qu’il a seul inspiré vos offres. Il serait possible cependant que l’amour-propre en eût pris les formes à vos yeux et vous eût abusé sur vos véritables motifs, et je serais charmé que cette idée vous mette assez en garde contre vous-même pour vous renfermer dans le cercle de vos devoirs actuels et me sauver le désagrément de vous en répéter sans cesse le conseil. Sur ce, je prie Dieu qu’il vous ait en sa